Mais redresse-t-on à coups de subventions une affaire depuis longtemps malade ? La sidérurgie et l'informatique (CII-Honeywell-Bull) ont fait la preuve du contraire. Du moins les conditions exogènes d'un succès sont-elles réunies : au nouveau management qui succède aux frères Willot de prouver qu'il saura en tirer le meilleur parti.

Distribution

Inquiétudes et perplexité

Une activité moyenne, des perspectives prudentes que n'arrivent pas à dissiper quelques résultats pourtant positifs : pour le commerce de détail, 1980 avait été l'année du ralentissement, 1981 restera l'année de l'adaptation à ce ralentissement.

Le volume des ventes continue de progresser (+ 1 % par rapport à 1980), engendrant un chiffre d'affaires de près de 862 milliards de F. Mais cette croissance arrive à peine à compenser le rythme annuel de l'inflation. Tandis que les investissements se stabilisent, l'emploi commercial ne progresse que faiblement (+ 0,2 %). Nombre d'entreprises connaissent des difficultés de trésorerie, entraînant une recrudescence des faillites et des licenciements économiques. Plus grave, pour la première fois depuis 1975, on observe une diminution de l'appareil commercial dans son ensemble. La régression est difficile à chiffrer, mais semble-t-il alarmante.

Réforme

Comme toujours, les marchandises générales accusent plus directement les effets de cette tension. L'activité reste faible, notamment en hygiène, culture et loisirs. Quelques secteurs (pharmacie, vente par correspondance, habillement) connaissent cependant des progressions satisfaisantes. Dans l'alimentation, le bilan s'avère plus positif. La croissance des ventes (+ 1,8 % en volume) profite aussi bien au petit commerce spécialisé qu'aux hypermarchés et magasins à succursales.

Autant de résultats somme toute acceptables qui n'arrivent pas à dérider une profession où règnent perplexité et inquiétude. La distribution attend (ou redoute ?) la vaste réforme des circuits commerciaux dont François Mitterrand a annoncé la mise en œuvre pour octobre 1982.

Réforme dans quel sens ? Certains craignent que la distribution ne serve de bouc émissaire à la lutte contre l'inflation, et on s'inquiète pour la liberté des prix, octroyée par René Monory en 1980 après trente longues années de blocage. André Delelis, ministre du Commerce et de l'Artisanat, et Jacques Delors (Économie et Finances) affirment certes que « la liberté reste la règle, et la concurrence la loi ». S'ils ne sont donc pas présumés coupables, les distributeurs savent qu'ils font l'objet d'une surveillance étroite. Ils notent que l'appareil d'observation des prix, abandonné par le précédent gouvernement, est lentement remis en place Et ils relèvent quelques signes avant-coureurs dans le sens d'un éventuel retour au dirigisme.

Dérapages

Tout commence dès août 1981, avec la possibilité octroyée aux préfets de taxer les prix de certains services (campings, hôtels, plus tard cafetiers). Une mesure « nécessairement injuste », expliquent les pouvoirs publics, mais destinée à sanctionner les dérapages de l'été.

Quelques jours plus tard, le 10 août, la loi Lang crée le premier accroc sérieux dans le régime de liberté.

Mais la distribution n'en a pas fini avec le problème des prix. Début octobre, c'est un sérieux tour de vis que donne le gouvernement : les prix de certains produits « sensibles » (pain, lait, beurre, café...) sont stabilisés pour 3 mois, ceux des services pour 6 mois. Pour ceux-ci, le retour à la normale ne sera accordé aux professionnels que moyennant des engagements de modération, souscrits par secteurs dès le début 1982.

Quant aux produits de consommation, ils font l'objet d'une trêve des prix le 15 janvier. Pendant 3 mois, les commerçants s'engagent ainsi à geler les prix de 24 familles d'articles, alimentaires et non alimentaires. Le ministère publie en avril un bilan de l'opération. On la juge satisfaisante, puisque 35 % des détaillants et 90 % des grandes surfaces auraient appliqué la trêve des prix. Mais ces estimations apparaissent pour le moins audacieuses à certains, et l'on estime que l'importance des engagements est restée très inégale selon les régions.