L'État, entre 1976 et 1981, a esquissé une politique de décentralisation de la jeune danse, en accord avec un certain nombre de villes (Angers, Rennes, Caen, Montpellier) ; mais c'est une goutte d'eau par rapport à la demande.

Une expérience a été tentée à Lyon, où la municipalité, pour répondre à la sollicitation des troupes locales réunies en association (l'ADRA – Action-Danse-Rhône-Alpes), a pris en charge la rénovation et l'équipement d'un ancien cinéma de quartier de la Croix-Rousse. Ainsi est née en juin 1980 la première Maison de la danse de France. Régie en coopérative, dotée d'un directeur administratif et d'un directeur artistique, elle cherche à attirer les Lyonnais par des programmes éclectiques. Mais la jeune danse française, pour espérer élargir son audience, doit faire preuve d'une grande qualité professionnelle.

Cette qualité, le public la trouve chez les troupes étrangères, qu'il s'agisse des Américains comme Viola Farber (nommée, en remplacement de Nikolaïs, à la direction du Centre de danse contemporaine d'Angers), Jennifer Muller ou Douglas Dunn, des Allemands comme Reinhilde Hoffman ou Pina Bausch — qui concrétisent le renouveau de l'expressionnisme — sans oublier Carolyn Carlson, installée à la Fenice et venue présenter à Paris Undici Onde, ballet où elle annexe Venise à son univers poétique.

Chanson

Elle tourne au rythme du temps

Quand la chanson se met à être mélancolique, elle l'est pour de bon. À peine a-t-on appris que les Frères Jacques, ces inséparables, mettaient pied à terre au bout de 35 ans de chevauchées communes, que les Compagnons de la chanson, nés en 1942, décidaient à leur tour de ne pas entrer en quarantaine. Les troubadours de tant de succès populaires (L'ours, Les trois cloches, Viens voir les comédiens, Alors raconte) font de leur tournée 1981-82 celle de leurs adieux.

Ils ne sont pas les seuls : l'un des plus grands auteurs de couplets du xxe siècle, Charles Trenet, se donne trois ans pour tirer sa révérence. Toujours jeune, le célèbre fou chantant voudrait ainsi se retirer sur la pointe des pieds.

Hommage

Au revoir, Mam'zelle Clio. Bonjour, Gaby. Heureusement, l'été oublie ses nuages dans la rock-ballade douce-amère d'Alain Bashung, Gaby oh Gaby. Dans un déballage surréaliste d'expressions tout à fait actuelles, Charles Trenet revient déjà : Tu veux qu'j'te chante La mer, le long, le long des golfes... pas très clairs... ? Bashung, la nouvelle tête d'affiche, n'est pas le seul jeune créateur à rendre hommage, à sa façon, au poète le plus fécond de la chanson moderne Jacques Higelin (Je veux cette fille, Champagne, Tête en l'air), qui passe les fêtes sur la scène du Mogador, naguère voué à l'opérette, fait souvent allusion à Ch. Trenet et le Québécois Plume Latraverse, qui triomphe en février au Forum des Halles, a inscrit à son répertoire un vibrant Salut Trenet tout à fait convaincant.

L'été a encore dansé sur le Banana Split d'une jeune Lolita made in Belgium, Lio. Sa voix acidulée intrigue d'abord l'opinion — truquage de studio ? —, mais la jeune vedette proteste et transforme son premier essai quelques mois plus tard avec un autre succès, Amoureux solitaires, qui, du coup, la fait connaître de l'Europe entière. Le couple Michel Berger-France Gall se partage également les honneurs du hit-parade avec, respectivement La groupie du pianiste et Il jouait du piano debout, tandis qu'Hervé Vilard supplie Reviens à tous les vents et que, célèbre en sa patrie, Riccardo Cocciante assène sur les vacances des Français un Coup de soleil qu'ils reçoivent de bon cœur.

Actualité

Mais c'est un fait : du côté cour au côté jardin, la chanson née après la dernière guerre passe pour de bon la main à celle de l'après-mai 1968. On rimait l'espoir, le bonheur retrouvé, l'horreur de la guerre, les liens éternels de l'amitié, la fatalité de la mort, bref les bons principes et les grands sentiments. Voici que l'on chante aujourd'hui le chômage, la peur du nucléaire, la citizen band, l'après-franquisme. En octobre, le Wallon Julos Beaucarne remplit la salle de Bobino avec des couplets écologiques où l'on retrouve la simplicité d'une vie en communion avec la nature et la communication retrouvée (Le chanteur du silence).