Souvent taxée d'être à la traîne de l'événement et de se montrer attentive aux faits et gestes des gouvernants, la télévision montre qu'elle peut aller au-devant de l'actualité et même, en diffusant ses journaux en direct de Pékin par exemple, créer l'événement.

Rediffusions

Si l'actualité télévisée compte sur l'impact des coups et la couverture la plus complète possible des événements (le voyage du pape Jean-Paul II, fin mai, ou le lancement de la fusée Ariane, le 24 décembre 1979), les programmes se montrent beaucoup plus calmes.

De part et d'autre, on réfute l'accusation d'une télévision à bon marché. Et pourtant les nouvelles rediffusions, de séries américaines entre autres se succèdent. Sur TF1 ou sur A2, où l'antenne est ouverte dès midi, il faut bien meubler les blancs entre deux plateaux en direct, ces émissions de l'après-midi (Aujourd'hui madame, Avec le regard des femmes, Les après-midi de TF1) que se dispute quiconque ayant un livre à vendre ou un disque à faire entendre. Et de Chapeau melon et bottes de cuir, Amicalement vôtre à La dynastie des Forsyte entre autres, on remplit à très bon compte les cases intermédiaires.

Affirmer pour autant que cette politique tue la création ne serait pas juste. Certes, le nombre d'heures de programmes de fictions originales reste sans doute inférieur aux programmes achetés, aux directs et aux rediffusions mis bout à bout. Et on ne peut appeler création, en effet, les variétés clinquantes du samedi soir sur TF1, même si ces shows trouvent acquéreurs dans de nombreux pays et rentabilisent l'investissement. Idem pour le Collaro Show, magazine burlesque de Stéphane Collaro, qui a fait ses classes d'anticonformiste chez le Jacques Martin du Petit rapporteur. À côté de ces productions, un spectacle réalisé par Jean-Christophe Averty où Henri Salvador rend hommage à Boris Vian (A2 le 21 novembre), ou Yves Montand interprétant ses dernières chansons font figure d'événements !

D'autant qu'on sait très bien, en France, produire des feuilletons honorables, des séries astucieuses et des dramatiques de bonne facture. Il est bien sûr regrettable de voir que cet effort concerne en priorité les programmes de fin d'année, mais les spectateurs conservent néanmoins un bon souvenir de plusieurs réalisations : Le journal, avec Philippe Léotard ; Joséphine (la vie de Joséphine de Beauharnais) avec l'inoubliable Danièle Lebrun, au mois de décembre ; Les dames de la côte, avec Françoise Fabian ; Orient-Express en janvier ; La fortune des Rougon d'après Zola, en février, ainsi que Petit déjeuner compris, une fantaisie conjuguée par Pierre Mondy et Marie-Christine Barrault.

Excellents

De la même manière, on peut marquer d'une croix quelques excellentes dramatiques que l'on aura plaisir à revoir dans quelque temps : L'oasis, avec Charles Vanel grandiose, le 15 janvier, et Les aventures d'Yvon Dikkebusch, de Maurice Failevic, avec un truculent comédien venu du Nord muni de son inimitable accent ch'timi : Ronny Coutteure, le 16. On n'oubliera pas non plus Roland Monod dans Louis XI, un seul roi pour la France et, au mois d'avril, Alain Mottel incarnant Léon Blum dans Le grand fossé, un film réalisé pour les Dossiers de l'écran, consacré au Congrès de Tours et traitant de la rupture socialo-communiste, en 1920.

Après sa carrière sur grand écran, l'œuvre de Zeffirelli, Jésus de Nazareth, est diffusée en 6 épisodes sur A2, aux alentours de Pâques. Laurent Broomhead — M. Météo sur A2 — semble avoir trouvé la formule d'un bon magazine de vulgarisation scientifique avec Objectif demain, alors que Patrice Laffont se voit contraint d'arrêter début juin son émission Mi-fugue, mi-raison. Enfin, une Histoire de la marine composée par Daniel Costelle et contée par Alain Bombard constitue de la bonne télévision, à la fois divertissante et instructive.

Ces événements, qui seraient anecdotiques ailleurs, concernent ici plus de 30 millions de téléspectateurs, devenus exigeants sur leur pain audiovisuel quotidien. Ils sont de ce fait les signes d'un goût, d'un souci, d'une émotion, d'un enthousiasme massifs.

Radio

Les guerres des ondes

À l'orée des années 80, la radio se porte bien. Les sondages témoignent d'un accroissement régulier de l'audience, qui, dans le même temps, apparaît beaucoup plus clairement comme un terrain privilégié où engager le fer des concurrences économiques ou des batailles politiques. L'année 1979-1980 aura été, à cet égard, significative d'une évolution dont les conséquences restent encore hypothétiques.

Les sondages

Recettes publicitaires obligent (pour les radios commerciales, les périphériques) : les études du CESP font la loi sur les grandes ondes. Trois vagues annuelles de sondages décident, pour un temps, du classement des stations en fonction de leur audience. Il s'agit alors pour chacune d'attirer le plus grand nombre d'auditeurs. Les campagnes de publicité fleurissent dans les métros, sur les murs, dans la presse.