Éducation

Primaire et secondaire : une réforme inachevée

Lorsque René Haby quitte le ministère de l'Éducation après quarante mois d'exercice, la réforme de l'enseignement qu'il a entreprise est encore loin d'être achevée. Il s'agit de réorganiser toute la scolarité obligatoire, le deuxième cycle secondaire et le baccalauréat, de changer la pédagogie et même l'administration de l'éducation : de définir « une politique d'éducation jusqu'à la fin du siècle », selon les termes du président Giscard.

L'objectif visé est de définir un minimum culturel pour tous et de permettre à chacun de l'acquérir à son rythme. La scolarité primaire doit être allongée, afin de réduire les redoublements par l'étalement des âges (certains pourront aller plus vite). Ce système libéral doit se continuer dans le second cycle par des options : après le baccalauréat de base, la classe terminale doit être presque entièrement optionnelle.

Au cours de son ministère, le plus long de la Ve République après celui de Christian Fouchet — qui se vantait lui-même d'avoir battu le record de Jules Ferry —, René Haby a fait un travail administratif considérable qui touche aux structures, aux programmes, à la pédagogie et au fonctionnement des établissements. Le résultat est sensiblement différent du schéma initial (Journal de l'année 1974-75, 1975-76, 1976-77) par suite des discussions avec les syndicats d'enseignants. D'autre part, René Haby n'a pas eu le temps d'achever l'édifice, même pour la période de la scolarité obligatoire. Ainsi les programmes des deux dernières années de l'école primaire ne sont pas encore fixés. Le ministre pensait avoir le temps devant lui, la réforme ne devant s'appliquer à ce niveau qu'à la rentrée 1980.

Des parents dans les écoles ?

Pour la première fois, les parents sont associés, au moins partiellement, au fonctionnement des écoles primaires et maternelles : la réforme Haby y a créé des comités de parents élus (de deux à cinq personnes selon la taille de l'école). Les élections ont eu lieu à la fin du mois d'octobre 1977 ; elles ont obtenu un assez vif succès : plus de 50 % des parents ont voté, au lieu de moins de 40 % dans les établissements secondaires. Cela s'explique : les écoles primaires sont plus petites et plus proches, les parents sont plus attentifs aux études des enfants ; ils peuvent suivre leur travail et souhaitent leur voir prendre un bon départ. La Fédération des conseils de parents d'élèves, dite Fédération Cornée du nom de son président, orientée à gauche, n'a recueilli que 51 % des suffrages contre 63 % dans renseignement secondaire.

Résultat pour une part de la campagne menée contre elle par les partis de la majorité, quelque peu appuyés par le ministère de l'Éducation, mais surtout de ses liens trop étroits avec le Syndicat national des instituteurs. Sa rivale, la Fédération Lagarde, a obtenu à peine plus de 10 % des voix, le reste allant à des listes indépendantes, notamment en zone rurale. Les parents ne sont pas encore vraiment admis dans les écoles. Ils n'ont à se prononcer que sur ce qui ne touche pas directement la classe : la garde des enfants hors des heures de classe, les transports scolaires, l'hygiène, la cantine, les loisirs, le règlement intérieur de l'école. Le comité, réuni par le directeur, ne peut donner d'avis qu'associé au conseil des maîtres. Pourtant, cela suffit pour que le Syndicat national des instituteurs s'oppose, prétextant qu'il s'agit d'une opération politique, et que l'on va susciter des affrontements entre parents et maîtres : en décembre 1977, il bloque la réunion des comités pour obtenir des réductions d'effectifs de classe et des avantages pour les directeurs d'école. Ce syndicat exige ensuite que les réunions aient lieu pendant les heures de classe, les enfants étant renvoyés chez eux. Au 1er mars 1978, de nombreux comités de parents ne s'étaient toujours pas réunis.

Désaccords

L'organisation du deuxième cycle et du baccalauréat est encore ignorée. La raison majeure de cette incertitude, c'est le désaccord entre le ministre de l'Éducation et le secrétaire d'État aux Universités, Alice Saunier-Seïté, qui devient ministre le 10 janvier 1978. Celle-ci souhaite qu'une certaine sélection soit faite dès l'entrée en seconde ou, en tout cas, pendant le second cycle. René Haby croit qu'il faut la faire juste à l'entrée dans l'enseignement supérieur. Le gouvernement penche plutôt de son côté, mais s'en tient à expérimenter la formule de second cycle prévue à partir de la rentrée 1977 dans quelques classes.