Sciences

Prix Nobel

Tous les scientifiques distingués cette année par l'Académie royale des sciences de Suède sont citoyens des États-Unis. Ce monopole, s'il a suscité quelques commentaires, s'explique assez naturellement par l'importance incomparable des moyens mis à la disposition des chercheurs d'outre-Atlantique, tant par l'Administration que par les firmes privées. Plus gênante est l'injustice possible des récompenses individuelles, à une époque où les acquisitions scientifiques sont presque toujours le fruit d'un travail collectif. Aussi certains proposent-ils au jury Nobel d'honorer désormais, le cas échéant, une équipe entière plutôt qu'un homme.

Physique

Il y a quelques années, plusieurs physiciens (l'Américain Glashow, le Grec Iliopoulos, qui travaille au CNRS, l'Italien Maiani) proposèrent d'ajouter, aux trois quarks prévus par la théorie comme constituants fondamentaux de la matière, un quatrième quark doté d'un nombre quantique nouveau, le charme. Fin 1974, Burton Richter observe, avec ses collaborateurs du laboratoire de Stanford, une particule qui ne se désintègre pas selon les schémas prévisibles et qui, tout en étant instable, met mille fois plus de temps à se désintégrer que ne le veut la théorie. Ce qui s'expliquait en admettant qu'elle était charmée. Elle fut baptisée psi. Dans le même temps, à Brookhaven, un résultat semblable est obtenu sous la direction de Samuel Ting, qui nomme sa particule J. La comparaison des observations montre qu'il s'agit de la même particule, dont la découverte ouvre à la physique des horizons nouveaux (Journal de l'année 1975-76). C'est la première fois qu'un laps de temps aussi court (moins de deux ans) sépare une découverte de sa consécration par le jury de Stockholm. À Stanford comme à Brookhaven, les équipes de chercheurs comprennent bon nombre d'« invités européens », dont plusieurs Français.

Burton Richter

Né en 1931 à New York. Travaille à partir de 1952 au MIT (Massachusetts Institute of Technology), où il obtient son doctorat en 1956. Il entre alors au SLAC, le grand centre de recherches de Stanford, auquel son nom est désormais lié. Dans ce laboratoire qui possède le plus puissant accélérateur à électrons du monde, Burton Richter construit un anneau de collisions où l'on observe l'interaction d'électrons négatifs et positifs (positons) accélérés à quelques milliards d'électrons-volts. Nommé professeur en 1967, Richter passe ensuite une année au CERN, avant de revenir à Stanford où il participe au projet d'un nouvel anneau de collision entre électrons positifs et négatifs. Expert consultant à la Fondation nationale des sciences et à la Commission de l'énergie atomique, il est membre de l'Académie américaine de physique.

Samuel Chao Chang Ting

Né en 1936 à Aun Arbor (Michigan), Ting est un chercheur à la carrière internationale. Rentré dans le pays d'origine de sa famille, la Chine, il y passe une partie de sa jeunesse, puis il poursuit ses études à l'université du Michigan, où il reçoit son doctorat en 1962. L'année suivante, il travaille au CERN à Genève. De 1964 à 1967, il enseigne à l'université de Columbia, tout en dirigeant, en 1966, un groupe de travail au laboratoire de DESY (Deutsches Elektronen-Synchrotron) de Hambourg. C'est dans ce laboratoire que Samuel Chao Chang Ting élabore les techniques qui le conduiront à ses découvertes ultérieures ; en 1975-1976, DESY a également joué un grand rôle dans l'étude du psi. Depuis 1967, le professeur Ting enseigne au MIT. Il est membre de l'Académie des sciences des États-Unis.

Chimie

Élément de numéro atomique 5, le bore ressemble au carbone par son aptitude à former avec l'hydrogène une grande variété de composés, les boranes. Mais l'atome de bore possède un électron de moins que l'atome de carbone. Or, la théorie classique de la liaison chimique — selon laquelle deux atomes peuvent s'associer dans un composé par la mise en commun de deux électrons — était impuissante à expliquer la structure moléculaire de divers composés du bore, pour lesquels il manque théoriquement un électron. Lipscomb a établi l'existence d'un mode de liaison dans lequel deux électrons de valence sont mis en commun, non entre deux atomes, mais entre trois, confirmant ainsi la représentation la plus récente de la liaison chimique, dite des orbitales moléculaires.

William Lipscomb

Né en 1919 à Cleveland (Ohio), William Nunn Lipscomb fait ses études à l'université du Kentucky et obtient son doctorat en 1946 au California Institute of Technology. Jusqu'en 1959, il enseigne la chimie à l'université du Minnesota, puis à l'université Harvard. Il est membre de l'Académie des sciences des États-Unis. Les travaux qui lui valent le prix Nobel — et qui ont eu le mérite de démontrer l'existence d'une nouvelle classe de molécules — datent des années 50. Actuellement, il s'intéresse à la biochimie, et plus particulièrement à la structure de certaines enzymes.

Médecine et physiologie

Ces deux lauréats ont conduit, indépendamment, des recherches qui éclairent la nature de virus non classiques.