Le 26 février 1975, le bulletin du Mouvement des forces armées publie un article signé du Père Goncalves, un ancien aumônier de la Ligue ouvrière chrétienne, qui critique violemment certains éléments du clergé pour leurs « manifestations de caractère antidémocratique ». Ceux-ci se servent, explique le P. Goncalves, de leurs bulletins paroissiaux, d'autres moyens d'information et de leurs chaires « pour raviver dans l'esprit des croyants des sentiments aliénants, qui vont de l'anticommunisme irréfléchi jusqu'au refus de tout projet de rénovation tendant à servir les intérêts du peuple ». Mais, de l'autre côté, on réplique que l'auteur de cet article souhaite, en réalité, inféoder l'Église au MFA. C'est le temps des déchirements.

Moyen-Orient

Le 18 août 1974, les services de sécurité israéliens arrêtent Mgr Hilarion Capucci, vicaire patriarcal melkite catholique de Jérusalem. Sa voiture était bourrée d'armes et de matériel de sabotage que l'archevêque, qui disposait de facilités de circulation et ne cachait pas ses sympathies pour la résistance palestinienne, aurait convoyés depuis Beyrouth.

Le 9 décembre, il est condamné par le tribunal du district de Jérusalem à douze années de réclusion. La salle de presse du Vatican publie le lendemain une déclaration qui fait part de la peine et du regret éprouvés par le Saint-Siège à la suite de cette sentence. Celle-ci, dit-elle, « ne pourra malheureusement qu'aggraver la tension des esprits ».

La plupart des autorités catholiques du Moyen-Orient assurent Mgr Capucci de leur solidarité. Les chefs des communautés chrétiennes de Damas écrivent, par exemple : « La cause de Mgr Capucci dépasse sa personne. Elle est notre cause à tous, la cause de tout Arabe, chrétien ou musulman, et de toute personne sensible aux valeurs spirituelles. »

Le 9 juillet déjà, l'Assemblée des patriarches et évêques catholiques du Liban avait adressé un message aux évêques du monde entier pour exprimer son soutien à la cause palestinienne. On pouvait y lire, entre autres, à propos du terrorisme : « il est tout indiqué de se demander quel recours à la violence est plus condamnable, celui perpétré par quelques individus ou celui qu'organise un État ? » La tendance, on le voit, est à une radicalisation des positions propalestiniennes dans toutes les communautés catholiques du Moyen-Orient.

Protestants

Durant l'année, les préoccupations majeures du protestantisme mondial ont été : assumer son pluralisme grandissant, retrouver une identité propre et affirmer ses positions éthiques.

Pluralisme

On ne peut plus parler aujourd'hui d'« un » catholicisme. À plus forte raison cela se vérifie-t-il à propos « des » protestantismes ? Quand on écrit ainsi, le lecteur risque de penser à la variété des familles confessionnelles protestantes héritées de passés mouvementés et divers. Il se trompe, car, précisément, ces divergences superficielles sont en voie de rapide disparition.

Luthériens et réformés, par exemple, sont parvenus à des accords décisifs concernant la prédication de la parole de Dieu et la sainte cène. De la même façon, des dialogues positifs ont lieu avec les baptistes, les méthodistes et même les anglicans, bien qu'un projet d'union entre l'Église d'Angleterre et l'Église méthodiste de Grande-Bretagne vienne d'avorter tandis qu'un projet similaire entre vaudois et méthodistes aboutissait en Italie. Ce ne sont plus ces divergences qui priment, mais des divisions internes liées à des manières apparemment inconciliables de vivre sa foi dans le monde actuel.

On retrouve aussi cela dans le catholicisme ou dans l'orthodoxie, mais ce ne saurait être cependant le signe d'un nouvel œcuménisme ! Ainsi, pour les célébrations du 8e centenaire de la conversion de Pierre Valdo (et donc de la fondation de l'Église vaudoise), pour le 4e centenaire de la création, par des huguenots émigrés de France, de l'Église wallone des Pays-Bas, pour l'évocation des figures de Guizot ou de l'humble bergère Isabeau Redoutière à l'assemblée annuelle du musée du Désert, en France, les uns trouvent leur réconfort spirituel dans ce passé qu'ils relient aux grandes proclamations de la Réforme du XVIe siècle, tandis que les autres, voulant ignorer ce passé et même ces proclamations, parce que, à leurs yeux, leur valeur est relative, vivent leur foi politiquement dans le concret de l'histoire présente.