Né du ciel Scandinave et du mystère des fjords, déchiré entre la rigueur piétiste et la révolte à la Strindberg, « le plus grand peintre de l'Europe du Nord » se sera surtout révélé comme un des plus étonnants graveurs de notre temps.

Lindner

Expressionniste attardé ou précurseur du pop' art ? Richard Lindner (musée national d'Art moderne, janvier-mars 1974) a fait de son œuvre une merveilleuse collection de fantasmes. New-Yorkais qui garde de Nuremberg, sa ville natale, la passion des jouets mécaniques, c'est d'abord dans l'affiche et le dessin de mode que s'est constituée sa symbolique urbaine et perverse. Femmes-poupées affublées de corsets-carapaces, hommes-mannequins aux chapeaux-casques de robots, plaques de carton de couleurs vives qui, assemblées, forment des figurines qui se prétendent des « couples » : toute la violence et la gaucherie de la foule solitaire.

Richard Ester

« Plus vrai que le vrai » : ce pourrait être la devise des hyperréalistes américains. Mais plus qu'à la réalité de la scène de la rue, du reflet sur une carrosserie d'automobile, de la chair flasque du corps nu, ces œuvres-reportages se veulent fidèles à l'image photographique qui leur inspire et leur impose un univers figé dans la fulguration insaisissable de l'instant.

Severini

Gino Severini (le Futurisme, 1909-1916, musée national d'Art moderne, septembre-novembre 1973) fut l'un des signataires du « Manifeste technique de la peinture futuriste » et, de tous les membres du mouvement, celui qui fit preuve de plus d'humour et de désinvolture dans ses tableaux où papillonnent les danseuses de Tabarin. Ses collages peuvent se comparer aux plus belles réalisations de Braque ou de Picasso.

Gnoli

Domenico Gnoli (CNAC, novembre 1973-janvier 1974) : une peinture qui, figeant tout mouvement, le révèle, pause entre deux contractions sourdes ; une vision fétichiste qui privilégie le détail d'une chevelure ou d'un tissu ; un art de myope qui, au-delà d'une réalité agressive, échafaude une métaphysique du voile et du vêtement.

Balla

Balla (le Futurisme 1909-1916) : moins fantastique que Carrà, moins alerte que Severini, moins systématique que Russolo, Balla s'inspire du pointillisme et se rapproche de Duchamp dans sa technique de décomposition du mouvement et de l'espace.

Hyperréalistes américains, réalistes européens (CNAC, février-avril 1974)

Malgré des points de contact évidents, les deux enquêtes sur le réel menées par les hyperréalistes suivent, de part et d'autre de l'Atlantique, deux chemins bien particuliers : si les Américains apparaissent asservis au document photographique, qu'ils s'efforcent de reproduire avec la plus grande précision, les artistes européens élaborent un commentaire disert du réel, plus socialement et politiquement engagé avec Aillaud ou Monory, plus formel avec Gäfgen, Titus Carmel ou Stämpfli, plus psychologique avec Jones ou Hofkunst.

Joan Miró

Enfant malin et artiste ingénu, Joan Miró a participé activement à la préparation de la rétrospective de son œuvre que présente le Grand Palais (mai-octobre 1974) : une remarquable sélection de toiles majeures de la période 1914-1970, préfacée par les toutes dernières peintures de l'atelier de Palma (1973-1974), et que ponctuent les assemblages de l'époque surréaliste, les céramiques des années 1946-1950, les bronzes récents et la violente tapisserie de Tarragone. Plus que « le triomphe du têtard et du vermisseau », cette exploration méthodique des générations microbiennes à travers l'espace glacé des horizons vides apparaît comme une suite de graffiti poétiques.

Ventes

Les antiquités, les tableaux et les objets précieux se sont révélés en 1973-1974 les plus sûres valeurs de placement, en raison d'une conjoncture économique dominée par l'inflation. Enfin, des sociétés d'investissement ont accentué la hausse en sollicitant une clientèle fortunée pour l'encourager à placer ses liquidités dans les valeur artistiques.

Le chiffre d'affaires de l'hôtel Drouot est passé de 340 à plus de 400 millions de francs au 1er janvier 1974, soit une plus-value d'environ 20 % en un an.