Depuis des dizaines d'années, psychologues, pédagogues et docimologues (la docimologie est la science des examens) ont étudié le problème de la notation et dénoncé son caractère nocif, peu scientifique et traumatisant. La réforme proposée, et qui a été appliquée dans beaucoup d'établissements sur décision du conseil d'administration, va dans le sens d'une notation moins quantitative que qualitative du travail des élèves.

La suppression des compositions trimestrielles vise à éliminer de la vie scolaire ces périodes de surchauffe artificielle.

La nécessité, que personne ne conteste sérieusement, de juger, d'une manière ou d'une autre, le travail fourni par un élève devrait désormais se doubler d'un effort de la part de l'enseignant pour apprécier les capacités de compréhension, de rapidité et d'expression de l'élève. L'instauration d'un tel système constitue une révolution qui nécessitera du temps avant d'être admise par tous.

Les parents, qui ont été les plus déroutés, devront s'habituer à ne plus exiger de leurs enfants de bonnes places par rapport aux autres élèves de la classe, mais à discerner la progression ou la régression de l'élève d'abord par rapport à lui-même.

De multiples incidents

L'année a été marquée, également, par une longue série d'incidents, de grèves, de meetings pour les motifs les plus variés. Mais l'influence des CAL (Comités d'action lycéens) a marqué un net recul. La journée nationale d'action sur les libertés politiques dans les lycées, en novembre 1968, avait constitué le dernier mouvement d'ampleur nationale.

L'agitation, qui a couvé dans la plupart des établissements secondaires, n'a pris un tour spectaculaire et violent que dans certains grands lycées, notamment à Paris.

Premiers incidents à Honoré-de-Balzac, où des élèves protestent contre le renvoi de plusieurs de leurs camarades qui avaient joué un rôle actif en mai 1968. Une grève d'élèves, fortement suivie, dure deux jours. En mai 1969, un incendie criminel éclatera dans l'établissement.

Un autre motif d'agitation tient au désir des comités d'action lycéens d'organiser à l'intérieur des établissements des conférences politiques ou des projections de films sur mai non autorisés par la censure. C'est ainsi que, le 30 septembre 1968, des élèves du lycée Jacques-Decour tentent de pénétrer de force dans la salle des fêtes et frappent le proviseur. Des incidents analogues ont lieu au lycée Chaptal peu avant les vacances de Noël et le lycée est fermé trois jours. À Michelet, où des élèves ont organisé une conférence interdite, la police intervient à l'intérieur de l'établissement et frappe des élèves.

Par ailleurs, l'exclusion d'élèves a donné lieu, notamment à Marseille et à Bordeaux, à des manifestations de protestation prenant parfois un tour violent. La blessure infligée à un élève du lycée Hoche (Versailles) par un policier au début de mars donne lieu à une grève prolongée.

Commandos contre lycéens

Le lycée Louis-le-Grand, qui compte parmi les plus prestigieux de Paris, a été le théâtre de nombreux incidents. Des groupes d'extrême gauche, notamment pro-chinois, recrutant surtout parmi les élèves des classes préparatoires à Normale Sup', y déployaient une grande activité, ce qui a provoqué à plusieurs reprises des réactions violentes d'éléments de droite.

Le 24 mars 1969, un professeur de lettres est frappé d'une crise cardiaque pendant une bagarre. La classe est fermée trois jours ; les élèves sont autorisés à rentrer en signant l'engagement de travailler. Le 21 avril, des élèves, au cours du conseil d'administration, frappent un membre de ce conseil, Jean Tibéri, député UDR. Quelques jours plus tard, la police fait évacuer des élèves qui avaient installé des stands de propagande maoïste dans le hall de l'établissement et des bagarres ont lieu entre élèves et agents.

Le 2 mai, un groupe d'extrême droite pénètre de force dans le lycée et provoque de violents incidents, au cours desquels un élève a une main arrachée par l'explosion d'une grenade. Le lycée est alors fermé pendant dix jours.

Rappel à la discipline

La permanence de l'agitation et les protestations de certains parents et professeurs amèneront en mars 1969 le ministre de l'Éducation nationale à publier une circulaire sur la discipline dans les lycées qui rappelle aux chefs d'établissements qu'ils ont à « assumer pleinement les fonctions d'autorité qui leur sont dévolues ».

L'orientation des élèves

Le gouvernement avait adopté, en avril 1968, un projet visant à organiser et à rendre moins libérale l'orientation des élèves à la fin de la troisième. Ce texte, jugé trop autoritaire par les organisations de parents et d'enseignants, a été une des nombreuses victimes de mai 1968 et le gouvernement avait promis sa révision.