Une autre expérience soviétique, bien que laconiquement présentée, a retenu l'attention des spécialistes : l'essai, en octobre 1966, d'un engin baptisé Yantar (ambre), qualifié de « laboratoire ionosphérique automatique » et destiné à essayer, entre 100 et 400 km d'altitude, un moteur à plasma gazeux. (Un tel moteur développe une poussée par trop insuffisante pour assurer la propulsion d'un engin spatial. En revanche, parce que cette poussée peut être assurée très longtemps, elle suffirait à compenser le léger freinage des satellites par la haute atmosphère, leur permettant ainsi de graviter longtemps sur des orbites très basses.)

La sonde américaine Pioneer VII, lancée le 17 août 1966, avait pour mission d'étudier le milieu interplanétaire, notamment de mesurer les bouffées de particules électrisées qui constituent le vent solaire. Pioneer VII est devenu une planète du Soleil.

Satellites espions

Le 7 décembre, la NASA a satellisé l'ATS-B, premier satellite de technologie appliquée. Gravitant sur une orbite de vingt-quatre heures, il est stationnaire au-dessus de l'océan Pacifique. Il joue le rôle d'un banc d'essai pour l'étude de futurs satellites météorologiques et de télécommunications (il a transmis de remarquables photographies montrant les masses nuageuses sur tout un hémisphère) ; il sert aussi à essayer une antenne nouvelle et divers instruments.

À tout cela s'ajoutent les innombrables Cosmos soviétiques (plus de 160) et les satellites militaires US (dont certains sont mis en orbite par grappes de 8).

Dans cette foule, il y a des satellites géodésiques, des prototypes de satellites servant à la radionavigation, des satellites de télécommunications à l'usage exclusif des militaires.

Il y a aussi les satellites espions (qui, parfois, s'espionnent entre eux), dont beaucoup ne vivent que l'espace d'un matin, ramenant rapidement au sol les photographies qu'ils ont prises. (C'est ainsi que, en novembre 1966, les Américains ont pu décrire la forme de l'ogive de la fusée à tête nucléaire que venaient de lancer les Chinois !)

Enfin, voici un bref résumé d'autres événements de l'année spatiale américaine : des essais de parachutes spécialement conçus pour l'atterrissage sur Mars ont débuté le 30 août 1966 ; simultanément commençaient les essais de maquettes de rotors de rentrée (la chute des capsules serait freinée et guidée par un rotor) ; plus prometteurs encore sont les essais, entrepris en juillet 1966, de planeurs spatiaux, capsules adaptées au vol plané, pourvues d'empennages et qui, pilotées, pourraient atterrir par leurs propres moyens, au lieu de tomber en mer soutenues par des parachutes.

Géophysique

L'effort spatial français

Après le lancement des satellites A1, FR1 et D1, le succès des deux satellites Diadème a confirmé la maturité des techniques spatiales françaises. Tout en soulignant ce qu'une telle réussite a d'exceptionnel pour un pays qui débute dans la conquête de l'espace, il convient d'en préciser la portée.

En comparaison des États-Unis, ou de l'URSS, la France fait encore de la petite astronautique : la fusée lunaire américaine Saturne V, par exemple, aura au départ une poussée cent fois plus forte que celle de Diamant. En dehors des deux géants, un seul pays autre que la France tente actuellement l'aventure spatiale dans le cadre national : c'est le Japon — qui a échoué dans ses deux premières tentatives de satellisation avec la fusée Lambda. Le satellite européen ne sera pas lancé avant deux ans. Ainsi, le retard de la France sur les deux grands n'est pas moins évident que son avance sur tous les autres pays ; c'est dans cette double perspective que doit être situé l'effort français.

La pleine capacité spatiale française correspond à la possession de quatre moyens :
– une fusée lance-satellites ;
– un champ de tir ;
– un réseau de stations au sol ;
– des satellites.

La France s'est dotée de ces moyens sous une double responsabilité civile et militaire. En principe, fusée et champ de tir dépendent de la délégation ministérielle à l'Armement, les stations et les satellites sont sous l'autorité du Centre national d'études spatiales (CNES). Mais la réalité est plus complexe.

La fusée « Diamant »

Historiquement, la fusée Diamant est un sous-produit de la force de frappe ; il n'est donc pas étonnant qu'elle ait été développée par les militaires. Pour réaliser les missiles stratégiques, la France avait besoin d'une fusée lui permettant d'expérimenter le guidage et la rentrée dans l'atmosphère. Ce fut l'engin bi-étage Saphir. Sur cette fusée militaire, il suffisait de placer un petit troisième étage à poudre pour obtenir un lance-satellites. Ainsi naquit Diamant.