Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Marie-Thérèse (suite)

La question de Bavière est soulevée par la mort de l’Électeur Maximilien III Joseph (déc. 1777) ; l’archiduc Joseph envisage un partage du pays, malgré l’hostilité de sa mère. Le problème est réglé par le traité de Teschen (1779), conclu sous l’égide des puissances médiatrices, France et Russie, réunies sur l’instigation de Frédéric II pour réduire à néant les projets de l’archiduc Joseph. Dans toutes ces affaires, Marie-Thérèse agit à contrecœur : elle n’approuve ni les méthodes brutales de son fils, ni les extensions de territoires « réalisées, dit-elle, au prix de notre honneur, de la gloire de la monarchie, de notre bonne foi et de notre sentiment religieux ». Jusqu’au bout, elle demeure persuadée que Frédéric II, que d’aucuns, dans son entourage, admirent, demeure le mauvais génie de la monarchie des Habsbourg. Cependant, joyeuse, allègre, à Vienne, capitale cosmopolite et musicale, à la Cour, dans les monastères, dans les résidences aristocratiques s’épanouit la civilisation issue du baroque*, forme d’art, mais également style de vie, époque de culture empreinte d’une mentalité. Sans doute, Marie-Thérèse n’a-t-elle pas exprimé toutes les contradictions et tous les paradoxes de cette société en mouvement, mais, contre vents et marées, elle en a assuré les valeurs traditionnelles.

G. L.

➙ Autriche / Frédéric II / Habsbourg / Sept Ans (guerre de) / Succession d’Autriche (guerre de la).

 H. Kretschmayr, Maria Theresia (Gotha, 1925 ; nouv. éd., Leipzig, 1938). / K. Tschuppik, Maria Theresia (Amsterdam, 1934 ; trad. fr. Marie-Thérèse, Grasset, 1937). / A. Novotny, Staatskanzler Kaunitz als geistige Persönlichkeit (Vienne, 1947). / E. Zöllner, Geschichte Österreichs von den Anfängen bis zur Gegenwart (Munich, 1961 ; trad. fr. Histoire de l’Autriche, Horvath, Roanne, 1966). / V.-L. Tapié, l’Europe de Marie-Thérèse. Du baroque aux lumières (Fayard, 1973).

Marie Ire Tudor

(Greenwich 1516 - Londres 1558), reine d’Angleterre et d’Irlande (1553-1558).


Marie Tudor était la fille d’Henri VIII et de sa première femme Catherine d’Aragon.


Une jeunesse contrastée

On songea bien vite à marier la petite fille : il fut un temps question du Dauphin (Henri II), mais c’est avec l’empereur Charles* Quint que les négociations allèrent le plus loin : le mariage fut décidé, et, si Henri VIII préféra garder sa fille près de lui plutôt que de la voir partir avec son fiancé, il s’engagea à l’éduquer « à l’espagnole » ; il fit d’ailleurs venir en Angleterre le plus grand humaniste de l’Espagne d’alors, Juan Luis Vives (1492-1540), auquel fut confiée l’éducation de la princesse. En fin de compte, Charles Quint épousa Isabelle de Portugal : on reparla alors d’un mariage avec François Ier ou avec le duc d’Orléans...

Ces brillantes perspectives furent brutalement interrompues par le divorce d’Henri VIII et de Catherine d’Aragon. Dans cette affaire, Marie prit aussi bien par inclination que par conviction religieuse le parti de sa mère. Séparée de celle-ci, elle ne pouvait plus guère compter que sur le soutien de l’ambassadeur de Charles Quint (Chapuys) et des catholiques, ennemis de la politique religieuse d’Henri VIII (Reginald Pole). Soutien d’ailleurs dangereux, surtout lorsque Anne Boleyn, puis Jeanne Seymour eurent donné d’autres enfants au roi : dès avant la naissance du futur Édouard VI, la situation de la catholique Marie était devenue si précaire que Chapuys, craignant de la voir enfermer à la Tour de Londres, lui conseilla de signer une déclaration par laquelle elle reconnaissait l’illégitimité du mariage de ses parents et, du même coup, son illégitimité propre, abandonnant ainsi ses droits à la couronne.

Dès lors, sa vie fut plus tranquille, surtout après le mariage d’Henri VIII avec Catherine Parr (1543).


L’accession au pouvoir

La situation redevint difficile pour Marie sous le règne d’Édouard VI ; d’un côté, celle-ci était le point de mire de l’opposition catholique, mais, de l’autre, les ecclésiastiques et les seigneurs protestants qui entouraient le jeune roi craignaient que l’accession de Marie au pouvoir en cas de décès du roi signifie la ruine de leur œuvre et leur perte. La santé d’Édouard déclinant, John Dudley, duc de Northumberland, qui s’était assuré un pouvoir absolu, imagina de faire proclamer reine d’Angleterre Jeanne Grey (v. 1537-1554), qu’il avait mariée à son fils Guildford Dudley. Normalement, Jeanne Grey n’était que quatrième en ligne de succession, derrière Marie, Élisabeth et Marie Stuart : on ne pouvait accepter l’élimination des trois autres candidates qu’en se fondant sur des raisons religieuses. Cela ne suffit pourtant pas pour assurer le succès de l’entreprise de Northumberland.

Lorsque Édouard VI mourut le 6 juillet 1553, Northumberland proclama Jeanne Grey reine, appuyé par tout le Conseil, qu’il avait gagné à ses vues. Mais il ne put s’emparer de Marie, qui, s’étant enfuie vers l’est, réussit en quelques jours à réunir près de 30 000 hommes autour d’elle. Dès lors, les « amis » de Northumberland assurèrent Marie de leur bonne volonté, et, sitôt que le duc eut quitté Londres pour marcher contre l’armée de Marie, ils proclamèrent reine cette dernière. Abandonné par ses troupes, Northumberland renonçait : arrêté le 21 juillet, il était enfermé à la Tour de Londres et exécuté peu après avec deux complices subalternes, ses autres alliés s’étant ralliés à la reine.


Les heureux débuts du règne

Marie présentait la plupart des caractéristiques des Tudors : le courage, une certaine jovialité, mais aussi une obstination inflexible, un sens aigu de son bon droit, le tout couronné par une absence totale de scrupule. À cela s’ajoutaient les effets d’une éducation espagnole, qui se manifestait surtout par une foi catholique fervente et entièrement dépourvue de sens critique. Enfin, en cas de mariage, il était à craindre que la reine, en bonne Espagnole, se soumette par trop à son mari. Marie était donc un personnage assez redoutable, surtout si l’on tient compte du fait que les épreuves et les amères désillusions de sa jeunesse avaient éveillé en elle des tendances à l’hystérie.

Elle sut, en tout cas, se modérer : elle pardonna aux complices de Northumberland ; Jeanne Grey et son mari, condamnés, ne furent même pas exécutés. Dans le domaine religieux, si la messe fut de nouveau célébrée un peu partout, Marie promit de ne rien décider avant la réunion du prochain Parlement ; dans le domaine financier, elle se montra également réservée.