Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

lésion (suite)

Les lésions de la peau, des cavités naturelles, des dents sont accessibles à l’examen direct et décelables par simple inspection. Certaines lésions traumatiques (hématomes, fractures, etc.) ainsi que les lésions des organes profonds ne sont souvent perceptibles que par la palpation ou par les touchers internes : c’est ainsi que des tuméfactions, des tumeurs pourront être observées au niveau du foie, de l’intestin, des organes génitaux, etc.

Les incisions pratiquées au cours des interventions chirurgicales permettent d’observer à l’œil nu et de palper des lésions profondes, qu’elles aient ou non été diagnostiquées par l’examen clinique.

Il en est de même des lésions observées au cours des autopsies.

Dans toutes ces circonstances, seul l’examen histologique au microscope permettra de connaître la structure et, par suite, la nature exacte des lésions observées. À cet effet, les fragments d’organe ou de tissu sont préparés suivant les méthodes habituelles de l’histologie* et examinés au microscope optique ou au microscope électronique.


Les différentes lésions


Lésions traumatiques

Elles résultent d’une action physique ou chimique venant de l’extérieur. Les causes mécaniques provoquent les coupures, les piqûres, les pénétrations de projectiles, ainsi que les écrasements, éclatements, broiements, fractures, accompagnés d’hémorragies internes ou externes. Les brûlures par agents thermiques ou par caustiques entrent aussi dans le cadre des lésions traumatiques. Quelle qu’en soit la cause, toutes ces lésions sont suivies d’une inflammation*, et il en résulte des lésions inflammatoires plus ou moins importantes, précédant la restauration et la cicatrisation.


Lésions inflammatoires

Elles sont consécutives à un traumatisme ou à une infection (les deux pouvant être associés) dans la grande majorité des cas. Parfois, la cause n’est pas évidente : un examen clinique approfondi et des examens complémentaires apportent le plus souvent le diagnostic. Il existe toutefois des inflammations dont la cause n’est ni traumatique ni infectieuse, et dont l’origine reste actuellement mystérieuse : c’est le cas de certains rhumatismes inflammatoires et de certaines affections chroniques touchant le tissu conjonctif*, telles les collagénoses.

Au microscope, les lésions de l’inflammation se caractérisent par la congestion, c’est-à-dire la dilatation des vaisseaux, par l’extravasation, c’est-à-dire l’issue hors de ceux-ci d’une partie des composants liquides du sang, responsable de l’œdème, par la diapédèse, qui est l’issue des cellules sanguines, et par un afflux de cellules de la série des leucocytes, constituant les infiltrats et les condensations (zones dures des régions inflammatoires). L’évolution se fait soit vers le retour à la normale par diminution du calibre des vaisseaux, disparition des liquides extravasés, départ des cellules mobiles (les leucocytes), soit vers le passage à la chronicité avec modification des substances intercellulaires (formation de tissus fibreux, sclérose), ou bien vers la liquéfaction de la zone infiltrée de cellules, aboutissant à la formation d’un abcès*, ou encore vers la nécrose (la mort locale) des tissus atteints.


Lésions dégénératives

Ces lésions peuvent faire suite à des lésions inflammatoires, ou leur être associées. Elles peuvent résulter de troubles circulatoires, de désordres métaboliques ou hormonaux, ou apparaître sans cause connue.

Des déformations peuvent être observées à l’œil nu : changement de coloration, d’aspect, de consistance. Les cellules sont le siège de modifications importantes portant sur le noyau (qui peut se morceler, se dissoudre) et sur le cytoplasme, dont les organites se modifient ou disparaissent et qui peut être le siège de surcharges (graisses, pigments, calcaire, etc.). Les lésions dégénératives sont irréversibles au niveau cellulaire ; mais dans un tissu atteint, si les cellules ne sont pas toutes détruites, celles qui restent assument la fonction, pouvant dans certains organes (foie) se multiplier et remplacer les cellules détruites, qui se trouvent éliminées par les leucocytes, comme des corps étrangers. Les substances intercellulaires participent à la dégénérescence et sont le siège de modifications physico-chimiques : sclérose (durcissement), surcharges diverses, etc.


Lésions tumorales

Elles résultent de la prolifération des cellules d’un tissu au-delà des limites normales. Il s’ensuit l’augmentation de volume d’un organe ou l’apparition en un point donné d’une masse dont les caractères peuvent être variables.

Si la prolifération respecte l’architecture du tissu d’origine, si les rapports entre le tissu épithélial et le conjonctif sont respectés, si les cellules se divisent par mitoses normales et si les éléments ainsi formés restent en place sans se détacher, il s’agit d’une tumeur bénigne. Si, au contraire, les divisions cellulaires sont monstrueuses, si le tissu épithélial pénètre sans ordre dans le tissu conjonctif ou inversement, si la tumeur se morcelé, formant un ulcère, si ses cellules se détachent pour aller se greffer dans un autre point de l’organisme pour former des métastases, il s’agit d’une tumeur maligne, c’est-à-dire d’un cancer*.

Il faut noter que des lésions inflammatoires et dégénératives sont souvent associées aux lésions tumorales, surtout lorsqu’il s’agit de cancers. Les causes des tumeurs tant bénignes que malignes sont encore mal connues. (V. cancer et tumeur.)

Rapports entre lésions et troubles fonctionnels

Troubles provoqués par les lésions

On comprend facilement qu’une lésion provoque des anomalies, des troubles dans le fonctionnement d’un organe. Ainsi, la section d’un nerf supprime le mouvement dans les muscles qu’il commande. Si le nerf est seulement comprimé par une lésion voisine, la diminution de force est variable suivant le degré de compression. Dans ce cas, la suppression de la compression rétablit le fonctionnement normal du nerf, alors que ce rétablissement ne peut se faire en cas de section. Un ulcère de l’estomac engendrera des douleurs et des troubles de la digestion. Au niveau des organes glandulaires, tels le foie, le rein, la thyroïde, etc., les perturbations fonctionnelles dépendent de l’étendue de l’atteinte : si une faible portion de l’organe reste indemne, les fonctions sont assurées par celle-ci. Dans certains organes, et notamment dans le cerveau, ce n’est pas tellement la nature de la lésion qui entraîne tel ou tel trouble, mais sa localisation : ainsi, une lésion du lobe temporal gauche entraînera une aphasie, qu’il s’agisse d’une plaie par balle, d’une hémorragie due à l’hypertension ou d’une tumeur.

L’étude comparative des symptômes observés et des lésions constatées dans les organes (au cours d’interventions ou au cours des autopsies) est la base de la méthode anatomo-clinique, qui a été pendant tout le xixe s. et au début du xxe s. essentiel de la pathologie.