Indy (Vincent d’) (suite)
Membre de diverses académies (Belgique, Angleterre, Pays-Bas) et de la commission de l’Enseignement musical de la Ville de Paris, comblé d’honneurs sans qu’il les eût recherchés ou sollicités, il ne cessa jusqu’à sa mort de consacrer toutes ses forces à la « défense et illustration » d’un art qu’il a toujours considéré, en l’associant à la foi religieuse, comme l’idéal humain le plus essentiel. La mort le prit, confiant et serein, comme il l’avait maintes fois souhaité : « ... Je m’en irai, tranquille, avec l’espérance que Dieu voudra bien admettre en son saint Paradis un pauvre pécheur qui, toute sa vie, a eu pleine foi en Lui. »
L’esthétique de Vincent d’Indy
Par l’écrit et par la parole, Vincent d’Indy a maintes fois précisé les bases de sa doctrine esthétique. Il a souvent insisté sur le caractère irrationnel, instinctif de l’inspiration, qui suggère à l’artiste une idée embryonnaire susceptible de développements que le travail et le talent du compositeur mèneront à leur plein épanouissement. Le métier, la technique sont donc insuffisants, considérés en soi, puisqu’ils n’ont la possibilité de s’exercer qu’à partir d’une matière musicale originelle, fruit de l’inspiration. Cette conception de l’art et plus spécialement de la musique conditionne toute la création artistique de Vincent d’Indy et permet d’expliquer les impératifs pédagogiques dont la Schola cantorum a mis en application les éléments essentiels. D’un tempérament très entier, aimant par-dessus tout l’ordre et la discipline de la pensée, Vincent d’Indy, dans sa vie comme dans son œuvre, est resté totalement fidèle à ses principes, et c’est avec courage qu’il a lutté pour défendre ses convictions personnelles contre les critiques qu’elles suscitaient.
Il avait le goût des vastes architectures sonores et des structures bien équilibrées, la forme sonate lui paraissant être « la forme » par excellence ; il ne cachait pas sa prédilection pour le style symphonique, qui se manifeste même dans ses œuvres de piano et sa musique de chambre ; il avouait sa préférence pour le contrepoint par rapport à l’harmonie, ses tendances polyphoniques et son souci du choix des tonalités dans un but expressif ; il montrait enfin une prédilection particulière pour les thèmes soit religieux, soit authentiquement populaires, ne cachant pas au surplus son profond mépris pour la facilité sous toutes ses formes. L’œuvre musicale de Vincent d’Indy est d’ailleurs à l’image de l’homme, dont elle reflète fidèlement les tendances spiritualistes. La musique religieuse et la foi ont été, pour ce compositeur, les sources d’inspiration les plus fécondes. Convaincu de la beauté du chant grégorien, il en a extrait les éléments les plus significatifs pour les insérer dans son œuvre : le Chant de la cloche, l’Étranger, Fervaal, la Légende de saint Christophe reposent sur l’expression symbolique de thèmes spécifiquement liturgiques ; toutefois, il ne renie pas non plus l’attirance du folklore, ainsi qu’en témoigne la Symphonie cévenole, car il s’agit, selon lui, d’une manifestation concrète de la vie populaire ; or, pour Vincent d’Indy, la vie et l’art ont une base religieuse commune. Cette conception hautaine explique l’éducation musicale que prodigua la Schola cantorum, lien de toute une génération d’artistes, amis et professeurs, élèves aussi, qui se groupèrent autour de son animateur.
G. F.
P. de Bréville et H. Gauthier-Villars, Fervaal, étude analytique et thématique (Calmann-Lévy, 1898). / E. Deniau, Vincent d’Indy (l’Âme latine, Toulouse, 1903). / F. Starczewski, la Schola cantorum de Paris ou Vincent d’Indy considéré comme professeur (Varsovie, 1905). / R. Rolland, Musiciens d’aujourd’hui (Hachette, 1908). / L. Borgex, Vincent d’Indy, sa vie et son œuvre (Durand, 1913). / A. Sérieyx, Vincent d’Indy (Messein, 1914). / C. Saint-Saëns, les Idées de M. Vincent d’Indy (Lafitte, 1918). / L. Vallas, Vincent d’Indy (A. Michel, 1946-1950 ; 2 vol.).