Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guillaume Ier d’Orange-Nassau le Taciturne (suite)

 Correspondance de Guillaume le Taciturne, prince d’Orange, éditée par L. P. Gachard (Bruxelles, 1847-1858 ; 6 vol.). / C. V. Wedgwood, William the Silent (Londres, 1944 ; trad. fr. Guillaume le Taciturne, Payot, 1947). / J. W. Berkelbach van den Sprenkel, Oranje, en de vestiging van de Nederlandse staat (Amsterdam, 1946 ; nouv. éd., 1960). / Y. Cazaux, Guillaume le Taciturne (A. Michel, 1970).

Guillaume II d’Orange-Nassau

(La Haye 1626 - id. 1650), stathouder de Hollande (1647-1650).


Le stathoudérat de Guillaume II marque un point culminant dans le conflit séculaire opposant le parti orangiste au parti républicain. Durant toute l’existence des Provinces-Unies s’est posé le problème politique qui était à l’origine du soulèvement contre l’Espagne : celui de l’équilibre entre le pouvoir central et le pouvoir régional. La délimitation équivoque des attributions respectives des états généraux et des états provinciaux, de même que la position ambiguë du stathouder ont entretenu un antagonisme symbolisé par l’opposition entre le pensionnaire de Hollande, chef du parti républicain, et le stathouder, porte-parole de tous les opposants à l’hégémonie de la bourgeoisie hollandaise.

Frédéric-Henri d’Orange-Nassau (1584-1647) avait déjà œuvré non sans succès au renforcement du stathoudérat (1625-1647) et usé de son influence au profit de son fils : à partir de 1631, Guillaume fut reconnu successivement comme héritier dans toutes les provinces, y compris la Frise, fait sans précédent. Poursuivant une politique étrangère en accord avec ses préoccupations dynastiques, Frédéric-Henri s’était attiré les faveurs de la monarchie française en favorisant l’alliance franco-hollandaise de 1635. Les marques de considération dont il bénéficiait facilitèrent la conclusion d’un mariage princier à la cour d’Angleterre entre Guillaume et la fille de Charles Ier Stuart, Marie (1641).

Réagissant contre la politique étrangère du stathouder, le parti républicain profita d’abord de la vieillesse de Frédéric-Henri, puis du manque d’expérience de Guillaume II pour opérer au détriment de la France un rapprochement spectaculaire avec l’Espagne. Frédéric-Henri se résigna aux négociations de paix hollando-espagnoles, menées à bon terme à la veille de sa mort (1647). Guillaume II ne put pas davantage empêcher la conclusion officielle de la paix en 1648. Nostalgique du traité de partage des Pays-Bas espagnols conclu en 1635 entre Richelieu et les Provinces-Unies, il assistait avec dépit à l’aboutissement de la guerre de l’indépendance, commencée quatre-vingts ans plus tôt.

Après 1648, aucune des provinces ne remit en cause l’Union scellée à Utrecht en 1579 pour la durée de la guerre contre l’Espagne. Si la confédération fut un moment ébranlée, c’est à la suite de contradictions opposant la politique dynamique et belliqueuse de Guillaume II à celle, mercantile et pacifique, des états de Hollande. À peine la paix signée, Guillaume II chercha à renouer avec la France l’alliance visant le démembrement des Pays-Bas espagnols, dont l’affaiblissement rassurait la Hollande, tandis que le voisinage éventuel de la France l’inquiétait. Par ailleurs, il entendait intervenir aux côtés des Stuarts dans la guerre civile anglaise, alors que la Hollande jugeait essentiel à ses intérêts commerciaux le maintien de bons rapports avec l’Angleterre républicaine de Cromwell.

L’épreuve de force entre le parti orangiste et le parti républicain s’engagea en 1650 au sujet de la fixation du taux de démobilisation. Décidé à asseoir son autorité par l’intimidation, Guillaume II fit arrêter plusieurs représentants des états de Hollande au même moment où un coup d’État frappait Amsterdam, bastion de l’opposition. L’effet de surprise ayant été déjoué, la ville fut assiégée. Mais les deux partis, l’un et l’autre enclins à négocier un compromis, dénouèrent la crise au bout de quelques jours. L’issue de cette confrontation restait incertaine. Quelques représentants ayant été symboliquement écartés, la magistrature urbaine hollandaise sauvegardait son autonomie vis-à-vis du stathouder.

La mort impromptue de Guillaume II provoqua un retournement de la situation. Nul ne sait si les Provinces-Unies auraient connu à leur tour une guerre civile à l’exemple de l’Angleterre ou de la France, ni si une victoire du parti orangiste aurait signifié la reprise des hostilités aux côtés de la France contre l’Espagne et l’intervention des Provinces-Unies dans les affaires anglaises. Par contre, la disparition de Guillaume II au moment où son successeur n’était pas encore né assurait pour un temps le règne sans partage du parti républicain et du grand pensionnaire Jean de Witt.

P. J.

➙ Hollande / Orange-Nassau / Provinces-Unies.

 A. Waddington, la République des Provinces-Unies, la France et les Pays-Bas espagnols de 1630 à 1650 (Alcan, 1895-1897 ; 2 vol.). / G. W. Kernkamp, Prins Willem II (Amsterdam, 1942).

Guillaume III

(La Haye 1650 - Kensington 1702), stathouder des Provinces-Unies (1672-1702), roi d’Angleterre, d’Écosse et d’Irlande (1689-1702).



Dans l’ombre de Jean de Witt

Guillaume naît huit jours après la mort inopinée de son père, le stathouder Guillaume II, emporté le 6 novembre 1650 par la petite vérole. Cette disparition jette le désarroi dans le parti orangiste, qui vient de triompher des états de Hollande. Ceux-ci tirent tout de suite parti de l’événement. À leur demande, une assemblée générale des états des sept provinces décide de déclarer chaque province souveraine et de ne pas donner de successeur à Guillaume II dans ses charges de capitaine général et de stathouder de cinq provinces. Ainsi triomphent les thèses républicaines favorables à l’hégémonie de la province de Hollande. Jusqu’en 1672, le grand pensionnaire Jean de Witt* va dominer de sa personnalité la République néerlandaise, arrivée à l’apogée de sa puissance. De leur côté, les orangistes attendront impatiemment, pour reprendre le pouvoir, que le jeune Guillaume III ait atteint l’âge d’homme.