Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Grèce (suite)

Pourtant, le nouveau procédé connut rapidement le succès et, à partir de 520 environ, remplaça presque complètement la figure noire. Euphronios, l’un des plus grands peintres de la fin du vie s., excella dans la description du corps des athlètes ou des héros. On a comparé à une planche anatomique la scène d’un cratère du Louvre représentant la lutte d’Héraclès et du géant Antée. La variété des sujets abordés par Euphronios est considérable : cavaliers, banquets, scènes de la vie quotidienne ou illustrations de légendes, partout l’artiste se révèle par la qualité de son trait et l’habileté de ses compositions. Les peintres qui lui succéderont (Euthymidès, Phintias, Smikros) s’efforceront de rivaliser avec lui, mais n’y parviendront pas.

Au ve s., la technique nouvelle est bien au point, mais des archaïsmes dans la représentation de la figure humaine (visages de profil, yeux vus de face) subsistent. Les peintres de la seconde génération, le peintre qui décora les vases de Kléophradès, le peintre de Berlin donnent cependant à leurs sujets plus de naturel et de souplesse dans le mouvement, plus d’expression dans le visage, plus de légèreté dans les plis des tissus. Les thèmes sont traités avec une ampleur inconnue encore jusqu’alors, mettant aux prises de nombreux personnages dans des scènes épiques ou religieuses.


La peinture classique

Dès 479 et la victoire des Grecs, emmenés par Athènes, sur les Perses, la production des vases attiques s’industrialise. D’artisanat d’art, la peinture sur vases devient activité industrielle. Des négligences dans le dessin, une certaine mollesse dans le trait et surtout une répétition des même thèmes se manifestent. Les artistes les plus novateurs, pourtant, trouvent leur inspiration dans le domaine de la grande peinture, dont, hélas ! ils ne nous donnent que des reflets fort modestes. Pourtant, l’échelonnement en profondeur des personnages, le recours à la polychromie et au décor naturel rappellent peut-être les conquêtes de certains artistes dont la tradition littéraire nous a conservé le nom, comme Polygnote de Thasos. Les fresques d’une tombe du ve s., récemment mise au jour près de Paestum, sont les seuls témoignages originaux de la grande peinture grecque classique qui nous soient parvenus.

Dans la vogue que connaissent les vases attiques au ve s., quelques artistes, comme le peintre de Pan, Hermonax ou le peintre d’Achille, maintiennent la tradition de qualité et d’originalité athéniennes. Mais la guerre du Péloponnèse brise le dynamisme d’Athènes, et, simultanément, une production concurrente, en Italie du Sud, conquiert les riches débouchés de l’Etrurie. La nature de la poterie à figures rouges se modifie profondément. Le dessin se libère de toute contrainte et gagne en mobilité ce qu’il perd en fermeté. Les tissus féminins se mettent à bouillonner ; les couronnes, les guirlandes se multiplient ; les personnages, de plus en plus nombreux, sont dépeints de manière naturelle et expressive. Les thèmes se modifient aussi, et l’on voit de gracieuses jeunes filles courtisées par des jeunes gens quelque peu efféminés, sous le regard d’un Éros ailé. C’est le style dit « fleuri ».

Dès 370 et pour une trentaine d’années, un nouveau terrain d’exportation amènera une recrudescence d’activité dans les ateliers athéniens. Une poterie, dite « de Kertch » et caractérisée par l’emploi de plus en plus abondant de couleurs surajoutées, de blanc surtout, se répand dans certaines régions du monde grec. Les personnages rouges alternent avec les fleurs blanches et forment de hautes pyramides sur la panse des vases. Ce dernier élan de la céramique figurée s’arrêtera comme il est né, très rapidement. Et, à l’époque hellénistique, le décor des vases exclura totalement les motifs figurés.

P. B. D. et O. P.

➙ Athènes / Crète / Délos / Delphes / Hellénistique (monde) / Olympie / Sicile.

 W. B. Dinsmoor, The Architecture of Ancient Greece (Londres, 1927 ; 3e éd., 1950). / C. Picard, Manuel d’archéologie grecque (Picard, 1935-1966 ; 8 vol.). / J. Charbonneaux, la Sculpture grecque archaïque et classique (Éd. de Cluny, 1939-1943 ; 3 vol.). / J. D. Beazley, Potter and Pointer in Ancient Athens (Londres, 1944). / R. Lullies, Griechische Skulptur von den Anfängen bis zum Ausgang des Hellenismus (Munich, 1956 ; trad. fr. la Sculpture grecque, Flammarion, 1958). / R. Martin, l’Urbanisme dans la Grèce antique (Picard, 1956). / G. M. A. Richter, Handbook of Greek Art (Londres, 1959). / M. C. Robertson, la Peinture grecque (Genève, 1959). / P. E. Arias et M. Hirmer, Mille Anni de ceramice grece (Florence, 1960). / H. Berve et G. Gruben, Griechische Tempel und Heiligtümer (Munich, 1961 ; trad. fr. Temples et sanctuaires grecs, Flammarion, 1965). / R. A. Higgins, Greek and Roman Jewellery (Londres, 1961). / P. Devambez, la Peinture grecque (Éd. du Pont-Royal, 1963). / J. Boardman, Greek Art (Londres, 1964 ; trad. fr. l’Art grec, Larousse, 1965). / P. Demargne, Naissance de l’art grec (Gallimard, 1964). / P. R. Franke et M. Hirmer, Die griechische Münze (Munich, 1964 ; trad. fr. la Monnaie grecque, Flammarion, 1966). / S. Mollard-Besques, les Terres cuites grecques (P. U. F., 1964). / J. Charbonneaux, R. Martin et F. Villard, Grèce archaïque (Gallimard, 1968) ; Grèce classique (Gallimard, 1969) ; Grèce hellénistique (Gallimard, 1970).

Grèce d’Asie

Sur la mer Égée (de l’Hellespont à Rhodes), mince frange d’îles et de terres peuplée de cités grecques, le long des hauts plateaux anatoliens.



L’implantation grecque

L’installation des Grecs sur la côte orientale de l’Égée aurait été le fait, affirme la légende, de trois vagues successives de colons : Thessaliens et Béotiens, d’abord, partis sous la conduite des descendants d’Oreste et de ses compagnons, se seraient installés à Lesbos, puis, de là, sur le continent, où, autour de Cumes, aurait été fondée une fédération de douze cités éoliennes. Les Ioniens, ensuite, chassés de Grèce par le retour des Héraclides, seraient venus, conduits par les fils de Codros, roi d’Athènes, s’établir dans les îles et sur le continent : à Milet, à Priène, à Éphèse, à Colophon, à Phocée..., douze villes qui formaient autour du sanctuaire du cap Mycale une confédération panionienne. Les contacts avec les indigènes, Cariens ou Lélèges, auraient été difficiles, mais trois générations auraient suffi pour qu’ils fussent en pleine sécurité. Enfin seraient venus des Doriens*, qui, eux, se rendirent maîtres des îles méridionales et de la côte au sud de Milet, sans pouvoir s’étendre très loin, vu l’hostilité des populations qu’ils y rencontrèrent.