Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bronze (âge du) (suite)

Le bronze nordique

Le bronze nordique, qui, jusqu’ici, ne connaissait que quelques objets d’importation, va prendre un essor extraordinaire après 1500 av. J.-C. Les tumulus recouvrent un coffre en pierre ou un cercueil en bois fait d’un tronc de chêne scié en deux par la longueur et évidé. Des conditions de conservation exceptionnelle, dues à l’acidité du sol et aux tanins de chêne, ont permis la préservation de costumes en laine et en écorce, d’objets en bois (sièges pliants, écuelles, louches, fourreaux, etc.) et même de la peau, des cheveux, des ongles et des dents des cadavres. La production métallique est abondante. Les manches de poignard et d’épée sont à disques en bronze alternant avec des disques en matières organiques : os, ambres, parfois rehaussés d’or. Pour le vêtement on utilise des fibules à deux pièces terminées par des spirales. Sur le devant de la ceinture, les femmes portaient de curieux disques en bronze munis d’un éperon central. À la ceinture également se portait le peigne en os. Les bijoux comprennent des bracelets en bronze massifs et des boucles d’oreilles spiralées en or ou en bronze. La poterie est pauvre.


La zone atlantique

La zone atlantique connaît une sorte de repli régional. Des vases funéraires sont utilisés dans les îles Britanniques et en Hollande (urnes d’Hilversum et de Drakenstein). L’Irlande livre l’or pour la fabrication de magnifiques bijoux torsadés, parfois longs de plus d’un mètre (torques de Tara). En Bretagne, la civilisation des tumulus voit l’apparition de la poterie avec des types biconiques souvent munis de quatre anses. De nombreux dépôts datent de cette période : haches à rebords du Médoc, puis haches à talon de Normandie et de Bretagne.


La civilisation des terramares

La civilisation des terramares s’épanouit en Italie du Nord, avec une agriculture florissante. On utilise des poteries dont les anses sont munies de pouciers ou d’appendices. Cette mode, déjà connue au bronze ancien, est le type de la Polada, que l’on retrouvera dans toute la Méditerranée occidentale. Des civilisations originales avec villages de huttes circulaires en pierre s’abritent dans les îles (Lipari, Sicile). En Corse, la civilisation torréenne succède à la civilisation mégalithique. Dans les grands ensembles architecturaux étudiés par R. Grosjean (Filitosa), on a réutilisé les statues-menhirs mégalithiques ornées d’armes : longues épées à pommeau en T et poignards triangulaires. Aux Baléares, on construit des tours circulaires (talayots), de même qu’en Sardaigne (nuraghi). En Italie centrale, la civilisation appennine est très pauvre.


Le bronze final

Les xiiie et xiie s. constituent, pour la Méditerranée, une période agitée : effondrement de l’Empire hittite, destruction de Troie par les Mycéniens, puis, peu après, des Achéens eux-mêmes par les Doriens ; il n’est jusqu’à l’Égypte qui ne tremble devant les « peuples de la mer ». Vers 1100-1000, le contrecoup lointain de ces mouvements va se répercuter en Europe pour donner naissance à la civilisation des champs d’urnes, qui relaie celle des tumulus.


Des civilisations de transition

Des civilisations de transition se font jour un peu partout, mêlant les traditions des tumulus du bronze moyen à des innovations techniques et culturelles. Le groupe de Riegsee, au sud de Munich, en Haute-Bavière, l’un des premiers, montre des influences hongroises italiques (poterie, poignards), de nouveaux types d’épingles (vasiformes) et d’épées à soie ou à poignée pleine. En France, des sépultures de transition apparaissent dans l’Aube (Courtavant, comm. de Barbuise) et dans l’Yonne (la Colombine, à Champlay). Ces nécropoles ont livré d’originaux produits, comme des défenses de sanglier enchâssées dans des montures en bronze ornées de spirales. La monture de la Colombine fut considérée comme un diadème, mais René Joffroy a recueilli celle de Courtavant, qui était posée au niveau de la ceinture, comme les disques danois précédemment évoqués. D’autres tombes de l’est de la France et du sud de l’Allemagne vont se caractériser par leurs longues épingles originales à collerettes mobiles ou fixes ou à tête de pavot imitant, par des rainures horizontales et verticales, le fruit de cette plante. La poterie est ornée de cannelures ; les épées sont souvent à languette triangulaire (Rixheim) ; il existe une variante atlantique (dépôt de Rosnoën).


La civilisation classique des champs

La civilisation classique des champs d’urnes va naître à la suite de ces phases préliminaires. Le rite de l’incinération en est la règle. Le mort est brûlé avec ses vêtements, ses armes ou ses objets familiers (rasoirs), puis les cendres sont déposées dans une urne enfouie dans le sol. Parfois on recouvre le tout d’un petit tumulus, mais, le plus souvent, la tombe est entourée d’un cercle de pierre ou de fossés circulaires (Champagne) ou en trou de serrure (Belgique). Des enclos rituels avec fossés sont également connus aux voisinages des champs d’urnes.

Différents centres ont été reconnus par leur poterie. Le groupe rhénano-suisse se distingue par des gobelets à épaulement, des coupes en forme de chapeau renversé, des urnes globuleuses. La décoration comprend des motifs géométriques : arceaux, festons, dents-de-loup. Parmi les bronzes les plus abondants, on retrouve des épingles vasiformes et des rasoirs. Dans le groupe du Main inférieur (Souabe), les urnes sont ornées de mamelons sur la panse et de cannelures entourant parfois ces mamelons. Le groupe du Bas-Rhin est plus pauvre, avec des urnes biconiques à col cylindrique. La civilisation des champs d’urnes atteint la France de l’Est, puis le Bassin parisien et les Charentes (Vilhonneur). Elle gagnera le midi de la France et le nord de l’Espagne dans sa phase terminale, vers 800 av. J.-C. De nombreuses variantes de champs d’urnes existent en Europe centrale et septentrionale, particulièrement en Lusace, où l’on plaça autrefois l’origine de ces civilisations. Si les champs d’urnes classiques sont bien développés à la phase ancienne dans la vallée du Rhin et du Main, il semble qu’à l’heure actuelle on recherche l’origine du mouvement vers la Hongrie. La métallurgie des champs d’urnes fut florissante : faucilles, épées, rasoirs, haches à ailerons, objets de harnachement furent fabriqués en abondance. Les épées sont souvent à poignée pleine (c’est le cas du type de Mörigen [Suisse] et du type hongrois de Liptov), parfois à pommeau en antennes. L’armement défensif, casques et cuirasses en bronze et même cnémides inspirées de modèles grecs, fut développé à cette époque, mais encore réservé à une minorité. La chronologie est délicate. Wolfgang Kimmig distingue quatre périodes de champs d’urnes depuis 1200 environ jusqu’au-delà de 750, aux débuts de l’âge du fer, où s’attardent encore quelques groupes de champs d’urnes (Catalogne).