Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

aviation (suite)

En dehors des domaines où, comme le transport aérien, l’avion se révèle irremplaçable, on peut penser aujourd’hui que missile et avion piloté deviennent de plus en plus complémentaires ; ce dernier trouve davantage sa place dans le domaine tactique, qui requiert le maximum de souplesse et surtout une intelligence et une rapidité de réaction devant l’événement, qui resteront encore longtemps le privilège de l’équipage humain.

P. L. et M. F.

➙ Aériens (transports) / Aéronautique et aérospatiale (industrie) / Aéronavale / Aéroport / Aéroporté / Armement / Avion / Bombardement / Chasse / Défense / Giraviation / Navigation / Radionavigation / Renseignement (aviation de) / Stratégie / Tactique (aérienne) / Transport / Vol.

 J. Hébrard, Vingt-Cinq Années d’aviation militaire, 1920-1945 (A. Michel, 1946-1947 ; 2 vol.). / R. Chambe, Histoire de l’aviation des origines à nos jours (Flammarion, 1958). / A. Josephy, The American Heritage of Flight (New York, 1962 ; trad. fr. l’Aviation et son histoire, Sequoia, 1964). / C. Dollfus, H. Beaubois et C. Rougeron, l’Homme, l’air et l’espace (l’Illustration, 1965). / C. H. Gibbs-Smith, The Invention of the Aeroplane, 1799-1909 (Londres, 1966) ; A Brief History of Flying (Londres, 1967). / J. Kessel, Mermoz (Gallimard, 1966). / E. Petit, Histoire de l’aviation (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1966 ; 2e éd., 1972) ; Énigmes et exploits de l’aviation de transport (Hachette, 1971). / J. Stroud, European Transport Aircraft since 1910 (Londres, 1966). / L. Castex, De Clément Ader à Gagarine (Hachette, 1967). / C. Demand et H. Emde, les Conquérants de l’air. L’aviation de 1903 à 1945 (Edita, Lausanne, 1968). / J. Lachnitt (sous la dir. de), l’Aviation d’aujourd’hui (Larousse, 1968 ; 2e éd., 1972). / F. Simi, Sur les traces de Philéas Fogg. 50 ans d’aviation commerciale française (Arthaud, 1969).

Avicenne

En ar. Abū Alī al-Ḥusayn ibn Sīnā, philosophe et médecin iranien (Afchana, près de Boukhara, 980 - Hamadhān 1037).


Il s’initia à la philosophie dans la bibliothèque du prince de Boukhara, puis voyagea dans le Khārezm et dans le Khurāsān. Il devint le vizir du souverain de Hamadhān.

Bien qu’incomplet, l’ensemble de ses œuvres connues semble considérable. Le Livre du jugement impartial et la Philosophie orientale, parvenus sous forme de fragments, constituent de véritables « sommes » de connaissances. Du xiie au xvie s., l’enseignement et la pratique de la médecine furent fondés sur son Livre de la guérison (de l’âme) [Kitāb al-Chifā] et sur son Canon de la médecine, recueil d’observations psychologiques, de remèdes thérapeutiques, de pharmacologie, de déontologie et traité de séméiologie. Il faudrait citer encore de nombreuses études de pharmacopée, de diététique et d’anatomie. Comme Aristote, Avicenne expose dans al-Chifā la logique, la physique, les mathématiques et la métaphysique, présentées dans un ordre identique dans la Salvation (al-Nadjāt). La rédaction en persan du Livre de la science (Dānech-nāmeh) appartient aux années 1030 et précède celle de son dernier grand voyage, les Directives et remarques. Au système de la connaissance philosophique se trouvent incorporées des considérations sur les sciences naturelles et la musique ainsi que déclarée l’hostilité contre les théologiens sophistes et dialecticiens.

L’originalité d’Avicenne réside dans sa théorie de la connaissance : la connaissance logique a pour lui une portée physique et métaphysique. Sa logique repose, comme celle d’Aristote, sur la distinction fondamentale de l’objet premier de l’intellect, qui est l’individu du concret, existant, et de son objet second, qui est notre connaissance même du réel.

Chaque notion universelle correspond à une réalité mentale, nommée essence, distincte de chaque autre par des propriétés spécifiques qui la déterminent. Chaque essence ne fait qu’exprimer adéquatement le réel, dont la pensée l’abstrait. En conséquence et à titre d’exemple, l’essence de l’âme étant autre que celle du corps, âme et corps sont réellement distincts, et une âme dépourvue de sensations internes et externes serait encore susceptible de se connaître elle-même. Ces essences, ou natures, constituent proprement l’objet de la métaphysique, c’est-à-dire la connaissance des définitions et rien d’autre. Chaque individu est singulier ; sur lui porte la science. Toute idée générale est universelle ; la logique s’intéresse aux universaux. Ainsi raisonne-t-on pour démontrer la neutralité de l’essence, son indifférence à la singularité comme à l’universalité : la « chevalité » définit la nature du cheval, indépendamment de ce qui lui manque pour signifier l’idée générale de cheval ou tel animal en particulier.

Dans une telle métaphysique, la distinction d’essence équivaut donc à une division des êtres. Avicenne dédouble ce concept en être nécessaire et en être possible. Est dit possible un être susceptible d’exister, sous réserve qu’il soit produit par une cause, elle-même possible ou nécessaire. À l’inverse, nécessaire s’affirme de ce qui n’a pas de cause ou qui, en vertu de sa propre essence, ne peut pas ne pas exister. De sorte qu’il est nécessaire à l’existence des possibles qu’il existe une cause nécessaire de leur existence. Ce nécessaire est défini « Dieu », cas unique d’une substance dont l’essence englobe l’existence. La priorité de l’être premier sur le reste est toute logique : de lui émanent les possibles. Mais comment s’effectue cette émanation ? « Quant à l’être nécessaire, il est séparé de la matière par séparation absolue. [...] Son essence qui donne l’existence à toutes les choses est connue de lui-même. Donc toutes les choses lui sont connues par sa propre essence » (Livre de la science).

Ainsi, l’Intelligence suprême devient la cause simultanément de l’être et de la connaissance ; par là elle introduit une multiplicité par emboîtements successifs, jusqu’à l’intellect humain disposé à l’accueillir. Au premier niveau, l’intellect se compare à la « table rase » chez l’enfant. Puis, réceptif aux sensations et images, l’esprit s’ouvre à la possibilité de connaître ; il est en mouvement, intermédiaire entre l’intellect purement passif et l’acte total. À force de répétition et d’exercice, l’intellect en acte parviendra à la science. Cette épistémologie caractéristique d’Avicenne et qui pose un unique intellect, agent pour toute l’espèce humaine, face à une infinité d’intellects possibles en chaque individu implique en outre un certain déterminisme ontologique : tous les hommes ne sont pas au même degré munis de l’aptitude à s’unir à l’Intelligence agente. Seul l’« intellectus sanctus » en atteint le sommet.