Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Saint-Sulpice (Compagnie des prêtres de)

Société de prêtres séculiers fondée au xviie s.


La Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice est l’œuvre de Jean-Jacques Olier. Ce prêtre, membre de l’école française de spiritualité de Pierre de Bérulle*, fonde en 1641, dans le cadre de la réforme du clergé, le séminaire de Vaugirard, qui est transféré un an plus tard près de l’église Saint-Sulpice, dont M. Olier vient d’être nommé curé.

Les prêtres de cette congrégation sont astreints à la vie commune, ils s’engagent sur une simple promesse, mais ne prononcent pas de vœux et conservent leurs biens. Leur fonction essentielle est de former des séminaristes. Déjà à cette époque, de nombreux séminaires, issus des conciles provinciaux tenus en France depuis le concile de Trente, surgissent et se développent. M. Olier profite des exemples existants, mais il garde une originalité créatrice en tentant d’appliquer plus fidèlement encore la pensée des pères conciliaires.

Il désire surtout gagner les élites en entreprenant la réforme du clergé sorti de l’aristocratie. Il écrit dans ses Mémoires : « Je vois que mon dessein ira à donner à l’Église beaucoup de bons sujets, que le roi imbu de nos procédés et de notre façon de vivre tirera de notre maison, et je pense qu’à l’avenir on viendra les choisir chez nous. » Il répond par là aux vœux de Richelieu, qui avait rêvé d’instituer une école où les fils de la noblesse seraient formés, les uns à la carrière des armes, les autres réservés à l’épiscopat.

M. Olier met les clercs de sa société à la disposition des évêques. « Le soin capital de la maison, écrit-il, sera donc d’instruire des ecclésiastiques qui puissent surtout aider Messeigneurs les prélats aux fonctions de leur diocèse, comme d’élever des clercs dans les séminaires, préparer les sujets pour les saints ordres [...]. Hors une douzaine de sujets liés à la maison [...], tout le reste de ceux qui y sont élevés sont livrés à la puissance de Messeigneurs les prélats [...], ces sujets n’étant institués et élevés que pour eux et se disposant à les servir en toutes les fonctions des diocèses, particulièrement au service des séminaires. »

Le séminaire de Saint-Sulpice fournit des prêtres qui fondent d’autres maisons en France et devient peu à peu une société de clercs qui sera approuvée en 1664 par le pape Alexandre VII.

Son troisième supérieur général, Louis Tronson (1622-1700), donne ses règles à la Compagnie et un esprit commun ayant pour base une méthode de prière et d’ascétisme consignée dans ses Examens particuliers. Sous son généralat, les Sulpiciens ont déjà formé une trentaine d’évêques dans leurs séminaires, qui, à la veille de la Révolution, comptent plus de trente établissements. En 1657, l’année de sa mort, M. Olier avait envoyé les premiers sulpiciens comme missionnaires au Canada.

La société est supprimée à la Révolution, mais grâce à son supérieur, Jacques André Émery (1732-1811), qui jouera un grand rôle dans l’histoire religieuse de son époque, elle est restaurée peu après le concordat de 1801.

Depuis, les Sulpiciens ont poursuivi leur apostolat et continuent de former des prêtres en France et en Amérique.

Jean-Jacques Olier

Jean-Jacques Olier naquit à Paris le 20 septembre 1608 dans une famille de robe ; son père était conseiller au parlement et devint intendant du Lyonnais en 1617. Il fit ses études chez les jésuites de Lyon, puis au collège d’Harcourt, à Paris.

Après son ordination, en 1633, il se mit sous la direction de saint Vincent* de Paul, suivit les « exercices des Ordinands », les « conférences du Mardi » et fit retraite au prieuré de Saint-Lazare. Saint Vincent de Paul l’envoya ensuite prêcher des missions en Auvergne (1634 et 1636-37) et en Bretagne (1638-39).

C’est là que, se rendant compte que le renouveau religieux reposait essentiellement sur la bonne formation des prêtres, il se résolut, sur les conseils au P. Charles de Condren, supérieur général de l’Oratoire, à fonder des séminaires et une manière de congrégation pour l’aider dans cette tâche.

J.-J. Olier fut également un écrivain spirituel, issu de l’école française, dont il fut, selon H. Bremond, le représentant le plus parfait. « Seul, écrit-il dans son Histoire littéraire du sentiment religieux, il nous en présente la commune doctrine dans toute l’étendue de ses principes et de ses applications [...]. Pas un paragraphe de quelque importance dans les gros livres de Bérulle ou dans les lettres de Condren, que M. Olier n’ait reproduit d’une manière originale, résumant tour à tour et amplifiant avec une compréhension parfaite l’enseignement de ses devanciers [...]. Sa grâce particulière, sa mission n’est pas de vulgariser le bérullisme, mais de le présenter avec une telle limpidité, une telle richesse d’imagination et une telle ferveur que cette métaphysique d’apparence un peu difficile devienne accessible et séduisante à la moyenne des lecteurs. »

Ses œuvres principales sont : la Journée chrétienne (1655), Catéchisme chrétien pour la vie intérieure (1656), Introduction à la vie et aux vertus chrétiennes (1658), Traité des saints ordres (1676) et ses Lettres spirituelles (1672).

Curé de Saint-Sulpice, la paroisse alors la plus grande de Paris (150 000 âmes), il déploya un grand zèle pastoral.

De santé défaillante, Jean-Jacques Olier dut interrompre son ministère à partir de juin 1652 et, en 1653, il fut frappé de paralysie. Il consacra ses quatre dernières années de souffrance à perfectionner l’œuvre du séminaire et mourut à Paris le 2 avril 1657.

P. R.

 F. M. Faillon, Vie de M. Olier (Poussielgue, 1841 ; 4e éd., 1873, 3 vol.). / H. J. Icard, Doctrine de M. Olier expliquée par sa vie et ses écrits (Lecoffre, 1891). / G. Letourneau, la Mission de J.-J. Olier et la fondation des grands séminaires en France (Lecoffre, 1906). / H. Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, t. III (Bloud et Gay, 1923). / J. Monval, les Sulpiciens (Grasset, 1934). / P. Renaudin, J.-J. Olier (A. Michel, 1943).