Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Paris (suite)

Tout en continuant les travaux de l’Empire, la Restauration refait les statues royales abattues par la Révolution. On assiste à plusieurs opérations immobilières, mais la soumission au dogme néo-classique est illustrée surtout par l’architecture religieuse. Outre la Chapelle expiatoire, commencée par Fontaine en 1816, des églises de type basilical sont édifiées, telles Notre-Dame-de-Lorette par Hippolyte Lebas (1782-1867) et Saint-Vincent-de-Paul par Jean-Baptiste Lepère (1761-1844) puis Jacques Ignace Hittorff (1792-1867).

La monarchie de Juillet donne à Paris des édifices publics où le style néo-classique se colore déjà d’un certain éclectisme. La place de la Concorde est transformée de 1836 à 1846, accueillant un obélisque de Ramsès II provenant de Louqsor, des fontaines dues à Hittorff, des statues de villes de France. La colonne de Juillet, œuvre de Jean Antoine Alavoine (1776-1834), est érigée en 1840 sur la place de la Bastille. Pierre-Jean David d’Angers (1788-1856) sculpte le fronton du Panthéon, ancienne église Sainte-Geneviève. Dessiné par l’architecte Visconti, le tombeau de Napoléon prend place aux Invalides. On agrandit dans leur style original l’Hôtel de Ville ainsi que le Luxembourg, où Delacroix* revient, comme au palais Bourbon et à Saint-Sulpice, à la grande tradition décorative. La peinture monumentale est pratiquée dans le même esprit par Chassériau* à Saint-Merri, Saint-Roch, Saint-Philippe-du-Roule et à la Cour des comptes (détruite par la Commune). Cependant, le romantisme favorise la réhabilitation de l’art gothique, pastiché par François Chrétien Gau (1790-1853) à Sainte-Clotilde ; des travaux de restauration sont entrepris à Notre-Dame par Viollet-le-Duc*.


Le triomphe de l’éclectisme*

Dans la seconde moitié du xixe s., l’architecture, techniquement novatrice, trahit son impuissance à se trouver un style en exploitant ceux du passé. Il reste que le visage actuel de Paris doit beaucoup à cette période. Le second Empire donne le signal d’une activité particulièrement intense. À partir de 1852, Napoléon III fait achever par Louis Joachim Visconti (1791-1853), puis Hector Lefuel (1810-1881) la liaison projetée depuis si longtemps entre le Louvre, agrandi et restauré dans un style pompeux, et les Tuileries (celles-ci incendiées en 1871, puis démolies). Plus importante encore est la modernisation de la capitale, œuvre du préfet Haussmann. Entreprise à des fins de maintien de l’ordre autant que de prestige, elle s’inspire des grandes perspectives classiques, non sans provoquer des destructions regrettables, surtout dans l’île de la Cité. Les habitations privées s’élèvent en grand nombre, parfois somptueuses, notamment dans la plaine Monceau et aux Champs-Élysées. Les édifices publics sont le plus souvent conçus pour clore des perspectives. La Renaissance inspire plusieurs églises : Saint-Augustin, de Victor Baltard (1805-1874) ; la Trinité, de Théodore Ballu (1817-1885). Dans la Cité transformée, Joseph Louis Duc (1802-1879) reste néo-classique au Palais de justice, Antoine Nicolas Bailly (1810-1892) pastiche la Renaissance au tribunal du commerce. Mais l’édifice le plus représentatif est le nouvel Opéra, construit de 1862 à 1875 sur les plans de Charles Garnier (1825-1898) ; son rôle mondain doit être souligné.

Le second Empire voit aussi l’essor de la construction en fer* (souvent encore dissimulée par un vêtement de pierre) : bibliothèques de Henri Labrouste (1801-1875), Halles de Baltard (auj. détruites), gare du Nord de Hittorff. L’architecture métallique prouvera sa maturité avec la tour Eiffel et l’éphémère galerie des Machines, construites pour l’Exposition universelle de 1889. On doit d’autre part au second Empire l’aménagement en style paysager du parc des Buttes-Chaumont, des bois de Boulogne et de Vincennes.

L’œuvre de la IIIe République commence avec la reconstruction ou la restauration des édifices incendiés durant la Commune, notamment l’Hôtel de Ville. L’éclectisme poursuit sa carrière. Après la fontaine Saint-Michel, Gabriel Davioud (1823-1881) élève celle de l’Observatoire, avec le concours des sculpteurs Carpeaux* et Emmanuel Frémiet (1824-1910), ainsi que le palais du Trocadéro (1878). Paul Abadie (1812-1884) commence en 1876 la basilique néo-byzantine du Sacré-Cœur. À tout cela s’ajoute une foule de bâtiments à tous usages : hôtels et immeubles de rapport, grands magasins, banques, théâtres, gares... Les peintres s’adonnent encore nombreux à la décoration monumentale, Puvis* de Chavannes trouvant seul un style personnel (au Panthéon, à la nouvelle Sorbonne). Le Triomphe de la République, groupe de Jules Dalou (1838-1902) érigé place de la Nation, le monument aux morts par Paul Albert Bartholomé (1848-1928) au cimetière du Père-Lachaise échappent à la médiocrité.


Les expériences du xxe s.

On peut distinguer trois phases dans la période contemporaine. La première s’étend à peu près de la naissance du siècle à 1914. L’Art* nouveau, ou « modern style », en est l’épisode essentiel, à côté des survivances de l’éclectisme. Il est assez rare que le mouvement soit suivi sans réserves par les architectes, comme l’a fait un Hector Guimard (1867-1942), auteur d’une synagogue rue Pavée, des portiques d’entrée du métro, d’immeubles aux structures souples et aux ornements imprévus, dépassés peut-être sur ce dernier point par ceux de Jules-Aimé Lavirotte (1864-1929). Plus souvent, le « modern style » exerce son influence, parmi d’autres, sur l’architecture et son décor. L’Exposition universelle de 1900 donne le ton ; il en reste le Grand Palais, habillage pompeux d’une structure métallique, le Petit Palais, qui lui fait face, et le pont Alexandre III, aux sculptures exubérantes.

Comprise entre les deux conflits mondiaux, la deuxième phase amène le règne du béton armé, expérimenté dès 1894 par Anatole de Baudot (1834-1915) à Saint-Jean-l’Évangéliste. Cette technique commence à utiliser un langage architectural qui lui est propre, sans se soustraire totalement à l’emprise des styles traditionnels : ainsi dans l’œuvre d’Auguste Perret*, dont le théâtre des Champs-Élysées (1911-1913) a la valeur d’un manifeste. De l’exposition de 1937, il reste surtout la reconstruction du palais de Chaillot (ancien Trocadéro), que de nombreux peintres décorent intérieurement.