Larousse agricole 2002Éd. 2002
V

vigne (suite)

C'est pendant la phase de croissance que se produisent des phases intermédiaires très importantes. La floraison a lieu fin juin, début juillet, en moyenne 2 mois après le débourrement. La fécondation suit immédiatement, lorsque la température se situe dans une fourchette de 18 à 25 °C. C'est une phase qui dure environ 10 jours, très délicate. En effet, une pluie peut provoquer un lessivage des fleurs, et donc une mon-fécondation. Des températures trop basses et un temps couvert, un excès de vigueur du porte-greffe, des attaques parasitaires peuvent aussi provoquer cette coulure, soit par effet mécanique, soit par effet physiologique. Si les baies ne tombent pas mais restent petites sur une partie de la grappe, c'est le millerandage.

La fécondation est suivie de la phase de nouaison, c'est-à-dire de la fermeture de la fleur fécondée, qui devient un fruit vert, petit et dur. Ce dernier se développe alors, assimilant la sève élaborée. Il est riche en acide et pauvre en sucre. Après un laps de temps variable suivant les cépages, le grain change de couleur : c'est la véraison, qui marque le début de la phase de maturation, avec arrêt du développement du rameau. Les grappes prennent leur couleur définitive, les pépins sont formés et aptes à germer. Leur richesse en sucre augmente, alors que la quantité d'acide diminue.

Lorsque le rapport entre les deux devient constant, la maturation est terminée : c'est la période des vendanges, en septembre et octobre. Si l'on veut obtenir des vins plus acides (vins blancs), on peut vendanger un peu plus tôt. L'obtention de vins spéciaux peut aussi conduire le viticulteur à retarder ses vendanges ; l'exemple le plus célèbre est celui du Sauternes : une surmaturation du raisin et un développement partiel de Botrytis cinerea (pourriture noble) conduisent à l'obtention d'un vin liquoreux. Dans d'autres cas, la concentration en sucre se fait seulement grâce au soleil : Banyuls, Rivesaltes, Frontignan, Samos, Xérès.

Culture.

La vigne est une plante de climat tempéré chaud, qui peut pousser sur tous les types de sol, depuis les sols secs, caillouteux, pauvres, jusqu'aux argilo-calcaires les plus fertiles. L'altitude joue un rôle important : en Europe, les vignobles ne peuvent dépasser 800 m, alors qu'au Mexique, par exemple, ils sont situés à plus de 2 000 m. La durée d'ensoleillement minimale nécessaire à l'accomplissement du cycle est de l'ordre de 1 500 h/an, dont 1 200 h pendant la phase végétative. Les climats très chauds sont peu favorables à l'obtention des grands vins, l'excès de température donnant des vins très alcoolisés mais « plats ». En revanche, la phase de maturation demande beaucoup de chaleur, donc des étés chauds, ensoleillés et peu humides. Les meilleures situations sont des sols relativement pauvres, filtrants, caillouteux, avec des pentes moyennes et un sous-sol rocheux. Cela explique que les meilleurs vignobles se trouvent dans les limites septentrionales de la zone tempérée, en Europe entre le 10e et le 50e parallèle. Au siècle dernier, la vigne s'est répandue sur les plaines, souvent côtières, en raison de la facilité de culture, de mécanisation. Les produits obtenus étant loin de la qualité de ceux des régions traditionnelles, la tendance actuelle est à la régression de la viticulture de plaine.

Installation de la culture.

La mise en place d'une parcelle de vigne est un investissement très lourd. Toute plantation en vue d'une production devant être commercialisée est soumise à une réglementation européenne ou nationale. Des opérations préliminaires consistent à arracher la vieille vigne et à désinfecter le sol pour éliminer les résidus de racines pouvant entretenir des parasites. Il faut ensuite défoncer le sol, c'est-à-dire labourer profondément pour faciliter l'implantation en profondeur des racines, puis niveler la parcelle pour faciliter la plantation proprement dite.

Avant plantation, il faut amender les sols et apporter une fumure de fond pour les enrichir en potasse et en phosphore. Des analyses de sol doivent donc être faites, permettant de plus de déterminer des carences éventuelles en oligo-éléments. Enfin, il faut prévoir l'élimination des eaux en excès et, éventuellement, un système de drainage. La mécanisation et l'utilisation du tracteur, si elles facilitent le travail, obligent à travailler souvent suivant la ligne de plus grande pente, et favorisent les phénomènes d'érosion. De nombreuses méthodes permettent d'en limiter les effets (stabilisation des chemins par des produits fixant le sol, création de buttes et de terrasses, enherbement des entre-rangs).

Il faut ensuite piqueter le sol pour déterminer la place de chaque plant en tenant compte de la densité choisie, de l'écartement entre les rangs et sur les rangs, de l'orientation choisie et du type de taille. L'ensemble de ces critères est précisément défini pour les VQPRD (vins de qualités produits dans des régions déterminées), et constitue le mode de conduite. Pour la plantation, on utilise actuellement des planteuses à guidage laser ; sinon, la plantation se fait à la main, en général au printemps - avec les plants « greffés-soudés-racinés » en pot, on peut effectuer l'opération plus tard. L'utilisation d'un paillage plastique permet d'obtenir une reprise du plant et une mise à fruit plus rapide.

Le greffage sur place, autrefois très utilisé, a pratiquement disparu. On met en place dans un premier temps le porte-greffe, en général à l'automne, puis on effectue le greffage proprement dit au printemps suivant. C'est un travail très délicat et pénible, avec un taux de réussite relativement bas, obligeant à reprendre l'opération plusieurs fois et parfois à remplacer des porte-greffes. Dans les vignobles palissés, il faut aussi prévoir la mise en place des piquets, leur ancrage, et disposer les différents fils de fer.

Travail du sol.

Traditionnellement, le sol est travaillé dans l'entre-rang et entre les ceps. À l'automne, on pratique un premier travail du sol, dit de chaussage : c'est un buttage qui consiste à rabattre la terre depuis l'entre-rang vers les souches, de manière à bien recouvrir le bourrelet de greffe, qui se trouve en général au ras du sol, de façon à le protéger du gel d'hiver. Au printemps, au moment du réchauffement du sol, il faut pratiquer un déchaussage, opération qui consiste à rabattre la terre depuis la ligne de souches vers l'entre-rang. Ces deux opérations sont effectuées, dans les vignes à faible écartement entre rangs, par des charrues dites « vigneronnes », qui travaillent toute la largeur de manière symétrique. Dans le cas du labour de chaussage, le corps central de la charrue est un buttoir. Le labour de déchaussage laisse, le long de la ligne de souches, une bande de terre appelée cavaillon. L'opération de décavaillonnage consiste à verser la terre vers l'entre-rang. Après le décavaillonnage, il reste autour de chaque cep un peu de terre que l'on peut supprimer par piochage ; cette dernière opération est surtout pratiquée dans les zones d'AOC (appellation d'origine contrôlée).